Le Conseil fédéral sort de son rôle

Une ère nouvelle a débuté. Les autres partis ont mis fin au temps de la concordance lors des dernières élections au Conseil fédéral. Depuis le 12 décembre dernier la Suisse n’est plus la même…

Toni Brunner
Toni Brunner
conseiller national Ebnat-Kappel (SG)

Une ère nouvelle a débuté. Les autres partis ont mis fin au temps de la concordance lors des dernières élections au Conseil fédéral. Depuis le 12 décembre dernier la Suisse n’est plus la même. Jusqu’à cette date toutes les forces politiques importantes du pays avaient leurs représentants au Conseil fédéral. Les trois principaux partis avec deux sièges, le plus petit des quatre avec un siège. Il n’en est plus ainsi aujourd’hui.

L’alliance des partis perdants a exclu du Conseil fédéral le gagnant des élections et le plus grand parti suisse, l’UDC, lors des dernières élections gouvernementales. Les autres partis ont voulu nous dicter nos représentants au Conseil fédéral. Ce serait une erreur fondamentale d’accepter cette nouvelle donne et de revenir à l’ordre du jour comme si rien ne s’était passé.

Il n’a pas échappé au peuple que les dernières élections au Conseil fédéral ont changé notre pays.

Il ne lui a pas échappé non plus que la Suisse conservatrice et libérale n’est plus représentée au gouvernement.

Enfin le peuple a compris qu’aujourd’hui – aujourd’hui plus que jamais – la Suisse a besoin d’une force extérieure aux cercles du pouvoir de la Berne fédérale, d’une force capable de s’opposer de façon décidée à l’alliance du centre-gauche.

Oui, le peuple réagit aux intrigues de ces froides et sombres journées de décembre dernier. Le peuple réagit à la confiscation du pouvoir par le centre-gauche. C’est ce que prouve la vague de nouvelles adhésions que connaît notre parti. C’est ce que prouvent également les scores historiques atteints par l’UDC à Schwytz et à St. Gall où l’UDC est devenue le premier parti cantonal pour la première fois de son histoire.

Et ce qui saute aux yeux du peuple c’est précisément ce que la classe politique bienpensante souhaite balayer sous le tapis.

Voici qu’un membre du gouvernement fédéral affirme lors de son discours d’ouverture de la Muba à Bâle que l’UDC ne peut pas entrer dans l’opposition. Que ce serait présomptueux de le croire, parce qu’en Suisse l’opposition serait représentée par le peuple et non par un parti. On ne peut que secouer la tête et se demander de quelle vision du pouvoir peuvent bien sortir ce genre d’idées saugrenues.

Je crois qu’il faut une fois de plus dire clairement les choses: dans une démocratie le peuple n’est pas l’opposition, il est le souverain! Dans une démocratie le peuple n’est pas assujetti au gouvernement. Pas plus qu’il n’est dans l’opposition face à ce même gouvernement. Non, il est au-dessus du gouvernement. Au risque de me répéter: dans une démocratie le peuple est l’instance suprême, Monsieur le Conseiller fédéral!

Mais ces errements sont un peu des lapsus freudiens. Ils en disent long sur le personnage. Ces phrases démontrent une attitude dangereuse: celle d’une personne présomptueuse et qui sous-estime la force du peuple. Et au mépris du peuple succèdent la mise sous tutelle et la confiscation des droits du peuple. Ce sont ce genre de convictions qui réduisent les citoyens libres à de simples contribuables corvéables à merci. Et c’est exactement ce que nous vivons dans la vie de tous les jours.

Cela n’a plus rien à voir avec la traditionnelle modestie républicaine des magistrats, avec notre tradition démocratique suisse, avec notre acception libérale de l’Etat.

Cela signifie la disparition du principe de la primauté populaire. La disparition de la conviction que le gouvernement agit au nom du peuple et a des comptes à lui rendre. La disparition de l’Etat de droit, qui a fait de la Suisse un pays libre, connaissant le succès et admiré dans le monde.

L’arrogance des puissants

Malheureusement le peuple ne se retrouve pas seulement spolié de ses droits par les réflexions fumeuses d’un conseiller fédéral. Ce dépouillement est bien réel. Cette arrogance de fonctionnaire se retrouve dans l’administration et la justice: la suffisance et l’insolence de la classe politique se font déjà clairement sentir dans la vie politique et dans notre liberté de citoyens.

Cette incompréhension du pouvoir a mené à des abus de pouvoir. Les copinages et les réseaux qui se sont tissés entre le gouvernement, l’administration et la justice échappent déjà dans leur majeure partie au contrôle démocratique du peuple. Les importants services de propagande des départements, financés par nos impôts, abreuvent d’informations les médias dénués de tout sens critique, subventionnés et par conséquent redevables à l’Etat. Ces mêmes médias qui en contrepartie inondent l’ensemble du pays avec des comptes-rendus biaisés. C’est ainsi que trop de médias se rendent complices de l’élite politique et d’un appareil d’Etat à l’emprise croissante.

Il suffit de penser à la façon dont le Conseil fédéral et l’administration exploitent le matériel de vote. Ils ne soumettent plus une question politique au peuple pour que celui-ci l’examine et prenne une décision. Ils tentent au contraire de manipuler le peuple de telle sorte que dans l’isoloir il avalise simplement les souhaits du gouvernement. Nous allons malheureusement devoir revivre cela dans les prochains mois: un branle bas de combat de la part des médias, des services de propagande officiels et des déclarations de l’administration auront la tâche de monter la population contre notre initiative pour des naturalisations démocratiques.

Mais nous pouvons rester sereins, car les faits nous donnent raison. Parce que nos arguments sont convaincants. L’Union suisse des arts et métiers l’a bien compris, elle qui a décidé, il y a quelques jours, de soutenir notre initiative. Un vrai miracle!

Mais la propagande d’Etat et l’abus de pouvoir de la classe politique se poursuivent dans l’indifférence la plus totale à l’encontre des décisions populaires. Il suffit de penser à l’initiative sur l’internement. Acceptée par le peuple, elle a été combattue et diluée par la coalition de gauche au Parlement. Au début, on a même refusé obstinément de faire une loi!

Ou encore l’épineuse question des naturalisations: le Conseil fédéral et le Parlement ont voulu assouplir nos conditions de naturalisation à trois reprises en 1983, 1994 et 2004. Ils ont essuyé trois échecs aux urnes. Et pourtant la gauche et les bourgeois bienpensants ont réussi à faire triompher leur point de vue. Ils ont réussi à nous imposer des naturalisations en masse. Les politiciens de gauche, les fonctionnaires de gauche et les juges de gauche ne se soucient guère de la volonté populaire. Ils misent sur le copinage dans l’administration et dans la justice. Quant aux médias, serviles, ils applaudissent des deux mains au lieu de dénoncer ces situations scandaleuses.

La suite est connue de tous; le nombre de naturalisations a explosé: si en 1991 ils n’étaient encore qu’un peu plus de 6’000 à se faire naturaliser, près de 50 000 étrangers ont obtenu le passeport suisse l’année passée! Ce qui signifie que le nombre de naturalisations a presque été multiplié par huit en un peu plus de 15 ans!

Prenons encore le nouveau droit d’asile et des étrangers. La proposition de notre ancien conseiller fédéral Christoph Blocher a été largement acceptée par le peuple. Le résultat des votations montre à quel point la population a appelé de ses vœux cette modification de la législation. Mais à peine cette loi est elle entrée en vigueur que des juges se sont mis à l’affaiblir et à la relativiser. Une poignée de juristes ont primé sur des centaines de milliers de citoyens suisses.

Jetons maintenant un œil aux statistiques de l’asile de 2007. Elles ont été gobées sans broncher par les médias. Pourtant elles auraient dû éveiller nos soupçons: l’Erythrée s’est hissée au premier rang des Etats dont sont originaires les demandeurs d’asile. Pourquoi l’Erythrée? Et bien c’est là que l’on constate toute la perversité d’une justice politisée. Une décision judiciaire a élargi les critères de l’asile, faisant des déserteurs érythréens des réfugiés politiques. Un nouveau critère invérifiable, que les hommes érythréens doivent considérer comme une invitation à demander l’asile chez nous. En d’autres termes, nous avons à faire à un cercle de juristes qui s’octroient des compétences législatives. C’est un exemple caractérisé de violation de la séparation des pouvoirs!

Les exemples ne manquent pas. Et les citoyens de se poser la question: qui prend donc vraiment les décisions dans notre pays? Est-ce encore le peuple, comme le prescrit notre Constitution? Ou est-ce le gouvernement avec ses fonctionnaires et ses juristes à sa botte?

Ce mépris du peuple, cette mise sous tutelle par la classe politique dicte également l’agenda politique de notre pays. Les désirs et les besoins de la population sont ignorés.

Et le Conseil fédéral?

Le Conseil fédéral est retombé dans ses anciennes mauvaises habitudes. Il n’assume plus ses fonctions de direction, il n’a plus de cap précis, il a été rarement aussi faible qu’aujourd’hui. Les promesses de réformes sont oubliées sitôt prononcées, car le pouvoir du gouvernement réside dans la bureaucratie croissante et foisonnante. Réforme du gouvernement, réattribution des départements, projet « Examen des tâches de la Confédération  » qui devrait examiner à la loupe le fonctionnement de l’Etat et de l’administration, économies de 20% dans le budget: toutes ces promesses sont reportées dans l’espoir qu’on les oublie un jour. Et maintenant qu’il n’y a plus de volonté de réforme au gouvernement toutes ces propositions vont prendre la poussière dans un quelconque bureau de fonctionnaire.

Une parenthèse s’impose ici au sujet du DFJP, un département remis sur les rails durant quatre ans par un conseiller fédéral UDC énergique et engagé. Le département annonce aujourd’hui des licenciements. Non que sa nouvelle cheffe lui ait prescrit une cure d’amaigrissement; non, elle a simplement décidé de mener une campagne de purge et de mettre à la rue ses collaborateurs de droite. Pour résumer la situation: vengeance et rancune plutôt que réformes. Et pendant ce temps l’appareil étatique ne cesse de gonfler et le nombre de fonctionnaires de se multiplier.

En matière de politique étrangère l’attention du Conseil fédéral se porte à nouveau sur l’UE. En effet il a décidé de négocier avec Bruxelles un accord de libre échange sur les produits agricoles. Pour le gouvernement cela représente une étape importante en vue d’une adhésion à l’UE. Les paysans suisses doivent être sacrifiés au passage, mais qu’importe: le libre échange avec les pays industrialisés de l’UE va anéantir l’agriculture suisse et réduire le concept de sécurité d’approvisionnement de la Suisse à un article désuet de la Constitution. Et le Conseil fédéral débat des primes de disparition accordées aux paysans suisses. Quelle honte!

Autre domaine d’activité important de la diplomatie suisse qui se révèle être un champ de mines: le Conseil fédéral a reconnu le Kosovo, prenant ainsi parti dans un conflit interne d’un Etat étranger. L’immixtion dans des conflits étrangers viole la neutralité suisse. La ministre des affaires étrangères joue à la grande puissance dans le sillage de l’UE. Mais cette attitude est grave et lourde de conséquences: la neutralité n’est crédible que si elle est vécue de façon cohérente. Et toute violation de ce principe inflige des dégâts irréparables à ce fondement de notre Etat.

Il est quasiment insupportable d’observer notre ministre des affaires étrangères qui se balade, imbue d’elle-même, sur la scène internationale, toujours à la recherche du feu des projecteurs. Avant de commettre une nouvelle bévue. Mais ce n’est pas elle qui en pâtit, mais bien la réputation de notre pays.

Elle porte le foulard lors de sa visite en Iran; elle veut s’adapter aux us et coutumes des pays qu’elle visite, explique-t-elle. Ce n’est qu’à moitié vrai: en réalité elle s’adapte aussi en Suisse aux us et coutumes étrangers. C’est ainsi qu’elle s’incline devant la Conférence islamique, l’organisation faîtière des Etats islamiques, et devant son secrétaire général, prend ses distances par rapport à l’initiative contre la construction de minarets.

Les escapades des régents

Les escapades personnelles de plus en plus nombreuses des conseillers fédéraux s’expliquent également par leur mépris du peuple. Car ceux qui se considèrent comme des régents supérieurs au peuple, ne tardent pas à placer leurs intérêts personnels avant ceux de leur pays. Leurs actes ne sont plus dictés par le souci du bien-être de la population.

Les mensonges eux-mêmes deviennent une bagatelle: Pascal Couchepin compare un élu du peuple, un citoyen parfaitement honorable, à l’un des pires criminels de guerre nazis. Ce qui est déjà grave en soi. Non content de son haut fait, il conteste ensuite ces accusations alors même que nous avons tous entendu l’enregistrement de ses propos. Ce qui rend l’affaire encore plus grave. Mais le plus grave, est qu’il en réchappe sans qu’il soit donnée de suite à l’affaire. Cela, nous ne pouvons pas l’accepter.

Et lorsque les conseillers fédéraux ne respectent plus la vérité et nos principes démocratiques, ils perdent le bon sens et trahissent l’esprit de la Constitution.

Pour Micheline Calmy-Rey le devoir d’intégration ne semble s’appliquer qu’à nous, les Suisses: l’initiative de l’UDC, par laquelle nous demandons que les étrangers soient contraints de se plier à nos lois, est jugée discriminatoire par Madame la Conseillère fédérale. A l’entendre, l’expulsion de violeurs et de meurtriers étrangers est déjà trop contraignante.

Pas de Suisse sans démocratie

Quelles conclusions devons-nous tirer de toutes ces débâcles et de ces erreurs? En Suisse le peuple est souverain – du moins d’après la Constitution. Et dans la réalité? De moins en moins. Le Conseil fédéral est sorti de son rôle. Il s’agit là d’un problème plus fondamental: une dangereuse appropriation du pouvoir par la classe politique, par une administration politisée et une justice qui ne l’est pas moins.

Le peuple a compris qu’il fallait aujourd’hui contre-attaquer. Le peuple veut mettre un terme à la confiscation du pouvoir par la classe politique. Nous ne pouvons tolérer une quelconque limitation de notre démocratie.

Maintenir une Suisse libre et libérale, voilà notre devoir. Et pour cela il faut un parti fort. C’est-à-dire une Union démocratique du centre forte.

Toni Brunner
Toni Brunner
conseiller national Ebnat-Kappel (SG)
 
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