Consultation

Révision du droit de la société anonyme et du droit comptable

Si certains points de ce projet de réforme peuvent être salués, on est tout de même amené à se demander si les réglementations essentiellement techniques et trop détaillées à notre avis de cet…

Réponse de l’Union démocratique du centre.

Si certains points de ce projet de réforme peuvent être salués, on est tout de même amené à se demander si les réglementations essentiellement techniques et trop détaillées à notre avis de cet avant-projet ne détériorent pas les conditions-cadres des PME et n’affectent pas la compétitivité de ces entreprises. Après avoir mené cette réflexion, l’UDC a décidé de demander le renvoi du projet à l’Office fédéral de la justice en chargeant ce dernier de préparer une loi plus simple, plus compréhensible et plus facilement applicable dans la pratique. Cette loi doit tenir compte des besoins des entreprises de différentes tailles et formes. En particulier, l’organisation de l’entreprise ne doit pas être imposée par des prescriptions étatiques, mais autant que possible choisie librement par le propriétaire de l’entreprise.

Pour l’UDC, une réforme utile et avantageuse du droit de la société anonyme doit viser trois objectifs:

1. renforcer la position de l’actionnaire en tant que propriétaire de la société anonyme;

2. accorder une marge de manœuvre aussi grande que possible à l’entreprise dans la solution de ses propres problèmes;

3. prendre en compte la forme de l’entreprise dans la législation (grande/petite, entreprises cotées/non cotées en bourse, sociétés coopératives).

Remarques générales
Des exemples de mauvaise gestion ont sérieusement ébranlé ces dernières années la confiance du public dans de nombreuses entreprises. Ce constat sert d’ailleurs pour l’essentiel à justifier cette réforme. Or, si certaines propositions paraissent effectivement utiles, il est vain de tenter de promouvoir la culture d’entreprise et les valeurs éthiques par un flot de dispositions légales. Les auteurs de cette réforme ne semblent pas avoir compris cela. Dans ce même ordre d’idée, il est totalement faux d’affirmer que cette révision est indispensable face « aux nouveaux besoins qui exigent de nouvelles règles légales ». C’est le contraire qui est vrai: des réglementations excessives empêchent les entreprises suisses d’agir de manière, souple, efficace, novatrice et compétitive. 

Par ailleurs, cet avant-projet ne tient pas assez compte des besoins divergents des entreprises. Les prescriptions contenues dans ce projet génèrent des charges administratives et financières pour les petites et moyennes entreprises, notamment, qui représentent tout de même 90% du tissu économique suisse. Dans sa forme actuelle, le droit comptable est acceptable pour les PME. Cependant, cette réforme annule les effets utiles des allègements que la révision du Code des obligations (droit des Sàrl et des révisions) du 16 septembre 2005 a apportées aux entreprises.

Les objectifs principaux de cette réforme

Amélioration du gouvernement de l’entreprise (corporate governance)

Action en restitution des prestations indûment perçues (art. 678 AP)Ces propositions dépassent largement l’objectif visé. La suppression de la référence à la situation économique de la société dans al. 2 ouvre un large éventail de plaintes pénales. Les tribunaux obtiendraient ainsi la compétence de juger des décisions prises au niveau de la gestion de l’entreprise. Cette idée n’est guère compatible avec un droit moderne. Il faut également maintenir le principe de la mauvaise foi à l’al. 1. Inscrit à l’al. 3, le droit de recours des créanciers à l’extérieur d’une faillite n’est pas justifié et il est en totale opposition avec les règles du droit de la responsabilité. L’introduction d’un délai de prescription de 10 ans (al. 4) signifie que les exigences découlant d’une prestation injustifiée ne seraient prescrites qu’après le dépôt d’éventuelles plaintes en responsabilité. Il en résulterait des situations choquantes dans les cas où les plaintes en responsabilité contre des administrateurs n’ayant pas assumé leurs obligations seraient prescrites alors que les actionnaires ignorants seraient tout de même contraints à la restitution.

Certificats intérimaires (art. 688 AP)
De nombreuses sociétés cotées en bourse disposent de certificats intérimaires et ne connaissent donc pas une partie de leur actionnariat. On comprend que certaines sociétés souhaitent dès lors que cette problématique soit réglée dans une loi, mais ce souhait doit être mis en balance avec la protection du secret bancaire et la praticabilité de la loi (garantir la négociabilité d’actions cotées en bourse). Ce n’est pas par hasard si le rapport explicatif arrive à la conclusion qu’aucune des solutions examinées n’est réellement satisfaisante. Il semble dès lors que le statu quo soit le chemin le plus pragmatique et le plus utile au marché des capitaux.

Droit permanent d’être renseigné (art. 697 AP)
Cette extension et formalisation du droit d’être renseigné entraînerait des charges administratives disproportionnées, surtout pour les grandes sociétés anonymes comptant des milliers d’actionnaires. Pour de simples raisons d’organisation, le droit d’être renseigné dans la forme proposée dans cette révision paraît extrêmement difficile, voire impossible, à garantir. 

Critères problématiques des valeurs-seuils (art. 697 a ss.)
Il est dans la nature des cours boursiers de varier, parfois même fortement. La référence aux cours boursiers pour la fixation de valeurs-seuils doit dont être refusée, car elle serait arbitraire. La convocation d’une assemblée générale extraordinaire ou l’ouverture d’une enquête spéciale représente des coûts considérables pour une société cotée en bourse. Il est donc problématique d’étendre par trop le cercle des personnes pouvant exiger la réunion d’une assemblée générale ou l’ouverture d’une enquête.

Indépendance et durée de fonction du conseil d’administration (art. 710 AP)
Dans le droit actuel, le conseil d’administration est élu pour trois ans sauf disposition contraire des statuts. En imposant une durée de fonction d’un an, le législateur prive les entreprises et leurs actionnaires d’une instrument efficace pour la gestion durable de l’entreprise. A propos de l’obligation d’élire individuellement les membres du conseil d’administration, il faut relever que l’autorégulation fonctionne actuellement fort bien à ce niveau. Une intervention de l’Etat n’est donc pas nécessaire.

Responsabilité de l’organe de révision (art. 759 al. 1bis AP)
La réglementation que le droit suisse prévoit pour les organes d’une SA est relativement sévère en comparaison internationale. Dans de nombreux cas, le risque peut être couvert par une assurance. Les risques en responsabilité qui en découlent ne dépassent cependant pas seulement les moyens financiers et la couverture d’assurances de PME, mais aussi celle de grandes sociétés de révision et des membres du conseil d’administration. La question de la limitation de la responsabilité des organes doit donc être examinée dans un contexte global (c’est-à-dire, en incluant la responsabilité du conseil d’administration dans le cadre d’une réforme du droit suisse de la responsabilité). Il serait nécessaire de limiter en plus cette responsabilité à un multiple de la somme au bilan ou à un multiple des revenus annuels.

Nouvelle réglementation de la structure du capital

Marge de fluctuation du capital (art. 652 AP) / réduction autorisée du capital
C’est la pratique qui détermine l’utilité des instruments proposés. Pour cette raison, l’UDC renvoie aux réponses des milieux économiques consultés.

Actions au porteur (art. 622 AP)
La suppression de l’action au porteur constitue une restriction inutile du choix dans le droit suisse des sociétés anonymes et doit donc être refusée. Il existe en Suisse environ 30’000 sociétés anonymes ayant émis des actions au porteur. Contrairement à ce que suggère le rapport explicatif du Conseil fédéral, des grandes entreprises suisses ont également fait circuler des actions au porteur. Il existe donc de toute évidence un besoin important d’actions de ce type. Les affirmations contenues dans le rapport explicatif et selon lesquelles les actions au porteur ont beaucoup perdu de leur importance ces dernières années et qu’il ne s’agit que d’actions de petites et moyennes entreprises sont donc fausses. Cela dit, l’identification des personnes contrôlant les actions au porteur doit être améliorée pour empêcher le blanchiment d’argent et le financement d’activités terroristes. De plus, il existe une obligation d’annoncer pour les sociétés cotées en bourse.

Mise à jour de la réglementation des assemblées générales
Bien que l’UDC ne s’oppose pas à ces innovations, la nécessité d’une réglementation aussi détaillée paraît douteuse.

Nouvelle réglementation de la tenue des livres

Publicité du registre du commerce (art. 928 AP)
L’UDC approuve expressément la nouvelle possibilité de consulter gratuitement en ligne. Le prélèvement d’émoluments par de nombreux registres du commerce cantonaux est une entrave au bon fonctionnement de l’économie et de la place financière suisse. 

Inscription au registre du commerce (art. 934 AP)
L’obligation générale de s’inscrire au registre du commerce doit être fixée dans la loi. Cette réglementation a en effet de nombreuses conséquences comme l’obligation de tenir des livres ainsi que les dispositions pénales (art. 166, 170, 325 CPS). De plus cette obligation doit être limitée à l’essentiel et les très petites entreprises doivent en être exclues en augmentant le montant déterminant des recettes brutes (aujourd’hui 100’000 francs, inchangé depuis 1971) et en le portant à 500’000 francs.

L’UDC propose la formulation suivante pour l’art. 934 al. 1 CO: « Celui qui exploite un commerce réalisant plus de 500’000 francs de recettes brutes par an dans les activités courantes… »

Obligation de tenir et de conserver les livres (art. 957 f. AP)
Une réglementation complète de la comptabilité commerciale, dans la mesure où celle-ci est vraiment souhaitable, impliquerait également le réexamen des prescriptions comptables figurant dans d’autres lois fédérales. Ainsi, la durée de conservation des livres est fixée à 10 ans (art. 958e AP) nonobstant le fait que la loi sur la TVA exige en son article 58 al. 2 une durée de conservation de 20 ans pour certaines pièces comptables. De l’avis de l’UDC, il serait plus que souhaitable que pareilles contradictions légales soient éliminées. Par ailleurs, une réglementation réellement complète exigerait que les prescriptions figurant dans des lois spéciales soient citées de manière exhaustive (art. 957 al. 3 AP).

La réglementation faite aux sociétés individuelles, associations et fondations, qui ne doivent pas s’inscrire au registre du commerce (art. 957 al. 2 AP) concerne avant tout de nombreux indépendants (arts et métiers, professions libérales, agriculture). On a du mal à comprendre pourquoi l’art. 957 al 2 AP n’impose presque pas de prescriptions alors que ces mêmes personnes physiques et morales sont soumises à des règles comptables sévères dans d’autres lois fédérales.

L’UDC est d’avis qu’il faut procéder selon une des variantes suivantes:

Variante A: la méthode de la situation existante doit être admise pour la comptabilité de ce groupe de personnes. De plus, il faut prévoir les prescriptions qui permettent à ces personnes physiques et morales d’assumer leurs obligations au niveau des prélèvements obligatoires fiscaux et sociaux.

L’UDC est favorable à l’admission de la méthode comptable de la situation existante qui est plus simple à appliquer et qui est donc plus répandue. Seule cette méthode permet à un non-comptable d’établir un bouclement annuel et de procéder aux actes comptables y relatifs.

Variante B: suppression pur et simple de l’art. 957 al. 2 AP. Ainsi, le CO ne règle que la comptabilité des personnes physiques et morales ainsi que des sociétés personnelles obligées de s’inscrire au registre du commerce. Cette situation est acceptable pour les personnes qui ne sont pas inscrites au registre du commerce et elle correspond à la situation légale actuelle.

Rapport annuel (art. 961b AP)
Les dispositions sur le rapport annuel qui est nouvellement exigé des grandes entreprises doivent être sérieusement revues et corrigées, voire carrément supprimées. Pour des raisons de concurrence mondiale, il n’est pas admissible que des entreprises soient contraintes de publier des détails sur leurs activités de recherche et de développement ainsi que d’autres secrets commerciaux. L’économie suisse doit bénéficier d’une protection raisonnable comme c’est le cas dans le droit actuel (art. 663h CO).

Etats financiers établis selon un référentiel comptable
L’obligation d’établir un bouclement selon un référentiel comptable (comme Swiss GAAP FER) doit être strictement limitée aux sociétés cotées en bourse si la bourse l’exige (art. 962 al. 1 chiffre 1 AP). Tous les autres destinataires des comptes et notamment les actionnaires minoritaires sont suffisamment informés par l’application de la disposition légale adoptée le 16 décembre 2005 qui étend les possibilités de demander une révision ordinaire ainsi que par les instruments de contrôle supplémentaires donnés aux actionnaires (art. 696 ss. CO, y compris révision spéciale selon art. 697a ss. CO).

Comptes consolidés (art. 693 AP)
L’avant-projet exagère complètement concernant l’établissement des comptes consolidés. L’UDC ne peut accepter que des petits, voire très petits groupes soient contraints d’établir un compte consolidé. L’obligation de présenter un compte consolidé doit restée basée sur l’actuel art. 663e CO.

 
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