Les versions écrite et prononcée oralement du discours font foi. L’orateur se réserve le droit de s’écarter fortement du manuscrit.
Monsieur le Président,
Monsieur le Président de la Confédération Guy Parmelin,
Chers Mandataires politiques, Chers Membres et Amis de l’UDC,
Chers Compatriotes,
Mesdames et Messieurs,
Malheureusement nous ne pouvons pas vous saluer cette année dans la salle comble de l’Albisgüetli. Il est cependant hors de question de renoncer à la manifestation la plus importante de l’année politique suisse, donc au traditionnel Congrès de l’Albisgüetli.
Des annulations de ce genre résultent trop souvent d’un souci excessif du confort, voire de la paresse.
Celles et ceux qui abandonnent le travail politique cèdent la place aux forces politiques qui profitent de la pandémie pour obtenir plus de pouvoir, pour renforcer leurs moyens de commandement et pour prendre plus d’argent aux citoyens.
L’Union démocratique du centre, l’UDC, est le parti du peuple laborieux. Plus que jamais en cette époque marquée par la pandémie notre pays a besoin de l’UDC.
Le principe est donc le même chaque année: dans le cadre son Congrès de l’Albisgüetli, le parti parle clair et prend position pour notre pays. Et comme le veut aussi la tradition, le président de la Confédération y prend la parole. Nous saluons donc cordialement Guy Parmelin, président de la Confédération.
L’UDC est un pilier de l’Etat. Elle respecte infiniment les institutions démocratiques et libérales de la Suisse.
Mais aujourd’hui – et surtout en cette époque de pandémie – ces institutions honorables sont écartées. Les autorités exigent de la population une confiance quasi illimitée, voire aveugle.
Mesdames et Messieurs, confiance dans les institutions, oui, mais non pas confiance aveugle dans les personnes qui régissent ces institutions. Et encore moins dans des personnes qui ne remplissent pas leur mandat.
En pareil cas, la critique et la résistance sont un devoir civique suprême.
Quelle confiance et quel respect mérite donc une autorité qui, comme le département de la santé publique du conseiller fédéral Alain Berset, a osé qualifier d’inutile, voire de nocif [1] le port du masque respiratoire pour ensuite, quelques mois plus tard, faire poursuivre par la police les personnes qui ne portent pas le masque? L’absurdité portée à son comble!
Et pourquoi ces aberrations? Parce que, malgré son prix énorme, notre système de santé publique n’était absolument pas préparé à la pandémie, mais que ses responsables refusaient de l’admettre, car ni des masques et des vêtements de protection, ni des appareils respiratoires n’étaient disponibles en nombre suffisant. Si bien que notre système de santé publique, prétendument le meilleur du monde, mais en tout cas le plus cher du monde, a rapidement atteint ses limites devant la dure réalité.
Accepter sans réagir pareilles énormités, c’est manquer de respect pour les institutions. Garder le silence devant ces dysfonctionnements, c’est nuire à la démocratie et au pays.
Pouvons-nous avoir confiance dans des personnes qui se plaignent d’un manque de lits d’hôpitaux, mais qui taisent soigneusement le fait que nos hôpitaux sont occupés de manière totalement disproportionnée par des migrants?[2] Ou qui refusent systématiquement d’admettre que la contamination initialement très rapide des cantons frontaliers du Tessin, de Genève, de Vaud et de Bâle-Ville avait un rapport avec la libre circulation des personnes et une politique d’asile laxiste.
Mesdames et Messieurs, se taire devant cette réalité, c’est porter atteinte à la démocratie et au pays!
L’obligation suprême des citoyennes et des citoyens, mais surtout des politiciennes et politiciens élus, est de veiller à ce que les autorités fassent leur devoir. Faut-il donc le rappeler une fois de plus? Les autorités sont au service du peuple, et non pas l’inverse!
Durant les 40 années écoulées, l’UDC n’a pas manqué de blâmer sévèrement les politiciens qui ont failli à leurs obligations. Elle doit à nouveau le faire aujourd’hui.
Ces derniers temps beaucoup de gens de l’UDC se présentent la tête basse, affirmant qu’ils étaient souvent critiqués, dénigrés, voire mis à l’écart.
Les jeunes élus, tout particulièrement, ont tendance à se plaindre. Ils ont envie d’être aimés. Ils cèdent à la résignation. Ils craignent pour leur image. Oh, mes chers politiciens qui cherchez à vous faire aimer, cessez donc de vous préoccuper de votre image!
Ce n’est pas la façade qui compte. Ce qui est important, c’est votre engagement pour le pays et le peuple. Il vaut mieux renoncer à une bonne image que de tenter de conserver une prétendue « bonne image » par de mauvaises actions politiques.
Mesdames et Messieurs, voilà comment l’UDC a politisé durant les quarante années écoulées. Cette politique n’a-t-elle pas fait notre succès?
Je commence par citer pour témoins nos adversaires.
L’ancien conseiller fédéral libéral-radical Pascal Couchepin, qui, depuis des années, ne cache pas sa haine à l’égard de l’UDC, s’est plaint du fait que l’UDC a, pendant de nombreuses années, poussé la politique suisse dans son sens par ses revendications.[3] Difficile de nous faire un plus grand compliment. Il est en effet heureux que l’UDC ait réussi à empêcher une partie des errements politiques de Couchepin et de son parti radical!
Josef Lang, ancien conseiller national issu de la gauche alternative, a écrit ce qui suit: « Jamais encore depuis l’introduction des élections à la proportionnelle on a vu une montée aussi spectaculaire d’un parti comme celle de l’UDC entre 1992 et 2015. Ne réunissant que 11,9% des suffrages en 1991, l’UDC a atteint 29,4% en 2015, soit presque le triple. »[4]
Oui, Mesdames et Messieurs, ce qui compte, ce ne sont pas les pourcentages de voix, mais l’orientation politique que la Suisse a prise grâce à l’UDC ou encore les mauvais développements qui ont été empêchés grâce à l’UDC. Nul besoin de chercher très loin.
Je me souviens fort bien de l’instant où Toni Brunner, alors président de l’UDC Suisse, s’est approché de moi après mon discours pour me dire avec inquiétude: « Dis-moi, Christoph, c’est énorme ce qui nous attend. C’est encore plus fou qu’une adhésion à l’UE. Mais comment allons-nous faire connaître cette affaire? Comment faire ouvrir les yeux à nos concitoyens? L’UE deviendrait le nouveau législateur en Suisse par la grâce d’un contrat signé par la Suisse? Du droit étranger et des juges étrangers? Notre Constitution fédérale en serait bouleversée! »
J’ai répondu comme suit à l’époque: « Nous autres gens de l’UDC, nous avons le devoir durant les semaines, mois et années à venir, de jour comme de nuit, d’informer sur tout cela et de mettre en garde les citoyens contre cet accord. Nous devons bien faire comprendre que tous ces traîtres à la patrie des autres partis avec la complicité de fonctionnaires fédéraux irresponsables – notamment des diplomates – cherchent à faire passer cet accord discrètement et sans discussion publique. »
Et l’UDC a accompli cette tâche d’information. Avec le succès que l’on sait. C’est exactement ce qu’a voulu dire mon collègue, l’ancien conseiller fédéral Pascal Couchepin, en reprochant à l’UDC de marquer des années durant la politique de la Suisse. Nous pouvons en être fiers, Mesdames et Messieurs.
Ce n’est que grâce à la résistance de l’UDC que ce contrat colonial, ce traité de soumission auquel on a donné le nom anodin d’accord-cadre, n’a pas encore été conclu. Détail qui nous rend confiant dans l’avenir: aujourd’hui, de larges milieux extérieurs à l’UDC combattent sans notre concours cette trahison de la patrie.
Cependant, Mesdames et Messieurs, nous ne pouvons pas en déduire que tous ces eurofanatiques ont changé d’avis. Mais au moins n’osent-ils plus avouer ouvertement leurs intentions, car ils savent fort bien que la grande majorité du peuple suisse est contre l’adhésion à l’UE et pour le maintien de l’indépendance et de la neutralité de la Suisse.
Vous le voyez bien: sans l’UDC, la Suisse est perdue. Nous devons continuer de nous battre avec courage, mais sans témérité, même si notre combat nous vaut des attaques et des dénigrements.
Nous autres gens de l’UDC, nous lançons l’appel suivant au Conseil fédéral: soyez entêtés quand il s’agit de défendre l’indépendance et la démocratie suisses! Car dans des négociations, surtout avec un interlocuteur plus grand et plus puissant, il arrive souvent que le plus petit l’emporte s’il sait faire preuve de suffisamment d’opiniâtreté. La Grande-Bretagne nous en a donné l’exemple.
Et notre conseiller fédéral Ueli Maurer à la tête du Département fédéral des finances a su réagir en toute discrétion, mais efficacement au chantage lamentable de Bruxelles menaçant d’invalider ladite équivalence boursière, prétendument si importante pour la Suisse, au cas où la Suisse ne signerait pas l’accord-cadre avant le 1er octobre 2019. Comme de coutume, de nombreux politiciens suisses se sont inquiétés. Même le quotidien zurichois « NZZ » s’est agenouillé devant les gesticulations de l’UE et a réclamé l’immédiate signature de l’accord[7]. Or, il n’y a pas eu de signature et l’équivalence boursière a été levée. Le plan B d’Ueli Maurer est donc entré en vigueur et – quelle surprise! – la Suisse en profite.
Mesdames et Messieurs, 2020 n’a pas été seulement l’année de l’épidémie du Covid-19, mais aussi celle d’un fossé grandissant entre la ville et la campagne. Installés dans les villes et de plus en plus subventionnés par les contribuables, les médias n’ont que propos méprisants pour notre formidable fédéralisme, le qualifiant prétentieusement d' »esprit de clocher » ou de « patchwork ». C’est oublier que la Suisse s’est faite de bas en haut et non l’inverse. L’article 3 de la Constitution fédérale est parfaitement clair: « Les cantons sont souverains en tant que leur souveraineté n’est pas limitée par la Constitution fédérale et exercent tous les droits qui ne sont pas délégués à la Confédération. »
Le fédéralisme, ce prétendu « esprit de clocher », gêne les bureaucrates centralisateurs de plus en plus nombreux. Ils tentent donc d’accaparer le pouvoir en multipliant les décrets urgents. Et, malheureusement, des gouvernements cantonaux trop faibles se laissent faire.
Les courageux partis fédéralistes d’autrefois, notamment le Parti catholique-conservateur qui reposait sur de puissants partis cantonaux, prêchent depuis quelques années l’abandon du fédéralisme en cherchant à exploiter un potentiel électoral urbain. Ils y ont perdu non seulement des électeurs, mais aussi la notion de « chrétien » dans leur nom. Et l’autre (autrefois) grande force fédéraliste, les radicaux et libéraux romands, ont disparu dans le projet de fusion « PRD – Les Libéraux » créé dans le but de récupérer des voix dans le marécage centriste. C’est dire que l’UDC a un nouveau et important rôle à jouer.
Comment le fédéralisme empêche-t-il le centralisme?
Les événements de l’année 2020 répondent à cette question. Ce n’est que grâce à une majorité de petits cantons ruraux encore politiquement en bonne santé que l’initiative dangereuse et hypocrite sur la responsabilité des entreprises a été refusée. Dans le canton de Zurich, le vote des deux grandes villes de Zurich et de Winterthour a malheureusement fait pencher la balance au niveau cantonal en faveur du « oui » bien que les dix autres districts aient rejeté ce projet.
Au niveau national également, le fédéralisme a empêché que la place industrielle suisse, la prospérité suisse et la sécurité du droit suisse soient sacrifiées sur l’autel du moralisme visqueux de milieux fainéants et hostiles à l’économie. En pleine crise provoquée par la pandémie du Covid-19, une majorité populaire dominée par des villes écolo-socialistes était prête à bouleverser notre régime juridique si efficace. Il n’aurait plus fallu faire la preuve d’une faute d’un accusé, mais ce dernier aura dû faire la preuve de son innocence. En vérité, un chamboulement brutal et complètement à côté de la réalité notre système juridique!
C’est uniquement grâce à ses campagnes dont les habitants ont su raison garder que la Suisse a renoncé à s’affaiblir aussi massivement. Mais déjà les perdants hurlent-ils à la suppression du principe de la majorité des cantons qui les a fait échouer.
V: Que faut-il faire?
L’UDC est taillée dans un autre bois.
Mesdames et Messieurs,
Retroussons donc nos manches!
Nous autres gens de l’UDC, nous nous inspirons des vers suivants:
Viva la Svizra! – Chars commembers da la Svizra Rumantscha
Viva la Svizzera! – Cari amici della Swizzera italiana
Vive la Suisse! – Mes chers amis de la Suisse romande
Es lebe die Schweiz – Liebe Deutschschweizer – in Freiheit und Sicherheit.
[1] Daniel Koch, représentant de l’OFSP, a affirmé dans le cadre de l’émission « Rundschau » de la radio suisse alémanique SRF que les masques portés par des personnes saines dans le public n’avaient pas d’influence sur l’épidémie et qu’elles pouvaient même entraîner le non-respect des règles de distance.
[2] Daniel Wahl: « 70 Prozent Migranten in den Spitalbetten » (70% des lits d’hôpitaux occupés par des migrants), dans: Basler Zeitung, 2.12.2020, p. 22.
[3] Marc Tribelhorn, Christina Neuhaus: « En cas de guerre, vous ne pouvez pas organiser une contre-attaque avec la démocratie directe », comme homme politique, Pascal Couchepin était si dominateur que ses adversaires l’appelaient le roi-soleil, dans: NZZ, 7.12.2020, p. 7.
[4] Josef Lang: Demokratie in der Schweiz, Geschichte und Gegenwart (Démocratie en Suisse, histoire et présent), Baden 2020, p. 247.
[5] Christoph Blocher: Kein EU-Beitritt auf Samtpfoten (Non à une adhésion à l’UE sur des pattes de velours, discours de l’Albisgüetli du 17 janvier 2014, présenté lors du 26e Congrès de l’Albisgüetli de l’UDC du canton de Zurich à la maison du tir Albisgüetli à Zurich, https://www.svp.ch/wp content/uploads/blocher-albisgueteli-d.pdf
[6] 13.4117 Motion du groupe UDC: Positions stratégiques concernant les relations entre la Suisse et l’Union européenne. Motion 14.3219 Reimann Lukas: Retirer la demande d’adhésion à l’UE et dire les choses telles qu’elles sont.
[7] Schöchli, Hansueli: Der Börsenstreit fällt politisch ins Gewicht (Le litige concernant la bourse a un certain poids politique). Dans: „NZZ“, 19.6.2019, p. 15.
[8] « Fais confiance en Dieu et non en des puissances étrangères; celui qui tous les jours fait ce qui est juste, fera ce qui est juste toute l’année. » Friedrich Wilhelm Weber (1813–1894), médecin, homme politique et poète allemand.