La place des violeurs est en prison
Depuis des années, l’UDC exige en vain un durcissement des sanctions pénales contre les criminels, avec des peines planchers en particulier contre les auteurs de crimes sexuels souvent moins sévèrement condamnés par le code pénal que ne le sont les conducteurs en excès de vitesse par via secura.
Simonetta Sommaruga a répondu enfin à cette demande le 25 avril 2018 en présentant une analyse globale des dispositions pénales en vue de déterminer si les peines encourues correspondent bien à la gravité des actes commis et si les sanctions sont proportionnées entre elles. Un projet de rééquilibrage des niveaux des peines entre elles est proposé, durcissant les sanctions pour les crimes de violence et les infractions contre l’intégrité sexuelle, dont les victimes sont le plus souvent les femmes et les filles. Pour le viol, la peine minimale passerait d’un an à deux ans de prison au minimum, ce qui constitue un pas dans la bonne direction, insuffisant toutefois à envoyer les violeurs en prison puisque deux ans restent une peine compatible avec le sursis. Un an minimum pour les actes d’ordre sexuel (autres que le viol) commis sur un enfant de moins de 12 ans constitue également une amélioration, insuffisante toutefois en comparaison de ce que risquent les auteurs de tels actes sur le territoire français par exemple.
Cédant à l’air du temps, Madame Sommaruga profite de cette réforme pour reformuler la définition du viol en extirpant, théorie de l’égalité oblige, toute référence au sexe de l’auteur et à celui de la victime. Dans sa définition classique, le viol se définit en effet comme l’acte sexuel contraint, qui n’est imposable par définition que par un homme sur une femme. La grande idée de cette réforme, permettre aux hommes d’être eux-aussi violés, en étendant la définition aux « actes analogues » à l’acte sexuel, est une fausse bonne idée en ceci qu’elle n’améliore nullement la protection spécifique due aux femmes et aux filles, qui restent et resteront sans doute toujours les premières victimes des agressions sexuelles. L’interdiction faite aux soldats de violer les femmes est d’ailleurs l’une des toutes premières mesures de protection des femmes à apparaitre en Europe au travers du droit de la guerre au Moyen âge.
Le viol comporte en effet pour les femmes une dimension particulière qui les distingue des victimes masculines. En plus du traumatisme psychologique, de l’humiliation, des blessures physiques et des risques de contamination inhérents à toute forme de pénétration imposée, les femmes qui subissent l’acte sexuel sont exposées au risque supplémentaire de tomber enceinte, à l’angoisse de l’attente de savoir si c’est le cas, au traumatisme de l’avortement si elles avortent, à celui de donner naissance à un enfant du viol si elles n’avortent pas. Cette dimension particulière qui n’est présente qu’avec l’acte sexuel justifie à l’évidence qu’on lui consacre un traitement pénal particulier et un régime de peine spécifique, apte à souligner la gravité étendue des conséquences endurées par les victimes et leur famille. Durcir la sanction encourue actuellement par les auteurs d’actes analogues à l’acte sexuel est à l’évidence une nécessité, il suffit pour cela d’introduire une peine plancher, analogue à celle encourue en cas de viol, lorsque la contrainte sexuelle comporte une pénétration. Mais évacuer la réalité de la souffrance spécifique des femmes et des filles, comme le fait le projet Sommaruga, dans le but absurde d’obtenir une définition non genrée de l’acte sexuel, qui est par nature genré, n’a aucun sens sinon celui de priver les femmes d’une protection spécifique à leur sexe.