La neutralité, pour notre sécurité
Le débat fait rage au sujet de la réexportation en Ukraine de matériel de guerre exporté par la Suisse. Le Conseil national a hélas accepté qu’à la demande d’un Etat étranger, la déclaration de non-réexportation puisse être abrogée. On parle de mettre hors service de 25 chars Léopard pour les revendre à leur constructeur allemand. La Cheffe du DDPS veut intensifier la collaboration de la Suisse avec l’OTAN. Au centre du débat : la neutralité – ou ce qu’il en reste !
Inscrite dans notre Constitution, elle représente un élément déterminant du positionnement de la Suisse sur la scène internationale. Il ne suffit pas d’en parler. On ne peut pas la tripatouiller comme un concept à géométrie variable, au gré des circonstances et des pressions étrangères ou encore de l’émotion suscitée par une guerre qu’on croyait impensable en Europe.
Indépendamment de considérations d’ordre constitutionnel, il est simplement dans l’intérêt de notre pays de nous tenir à l’écart d’une guerre qui n’est pas la nôtre. Car cette guerre, on le voit bien, par Ukraine et OTAN interposées, met aux prises la Russie et les USA dans une confrontation très dangereuse, qui laissera au minimum un pays en ruine et une Europe plus affaiblie encore qu’elle ne l’est déjà.
Halte à la fuite en avant
On entend aujourd’hui bien des discours bellicistes. On parle de « guerre juste », concept gros de risques d’escalade. On parle aussi de « gagner la guerre ». Mais qu’est-ce que cela signifie ? Reprendre les territoires perdus par l’Ukraine depuis un an ? Reconquérir la Crimée ? Ou encore même marcher sur Moscou, comme des chefs ukrainiens semblent en avoir le fantasme ?
L’abandon de la clause de non-réexportation, même revêtu des oripeaux de l’ONU, c’est une manière hypocrite, qui ne dit pas son nom, de précipiter la Suisse dans cette guerre. Par-là, nous ne pourrions qu’attiser cette guerre et à coup sûr la prolonger au lieu jouer la carte la plus utile que la Suisse puisse jouer dans le monde : reprendre la main dans les bons offices (à moins que nous ne préférions laisser ce rôle à un pays comme… la Turquie).
Dans ce concert belliciste, l’UDC parle en effet, justement, de ce rôle historique de la Suisse. Au lieu d’armes, nous parlons d’envoyer des diplomates, de travailler à la paix plutôt que de jeter de l’huile sur le feu de cette terrible guerre.
L’UDC, hélas presque seule, refuse de céder aux pressions étrangères (OTAN, Allemagne). Nous refusons le chantage.
Penser et agir en tant que Suisse
Nous aussi, nous sommes inquiets de l’avenir de notre industrie de la défense. Nous savons que pour survivre et livrer notre armée à des conditions correctes, celle-ci doit pouvoir exporter dans des conditions réalistes. Mais pas au prix de notre neutralité. Ni d’une adhésion rampante à l’OTAN, qui ne nous apporterait aucun surcroît de sécurité mais tout au plus une forme de sujétion.
Plutôt que d’agir sous le coup de l’émotion et de céder hâtivement aux pressions étrangères, plutôt que de risquer d’être entraînés dans une guerre qui n’est pas la nôtre, notre intérêt à long terme, c’est de reconstituer une industrie de la défense aussi complète et surtout autonome que possible ; c’est de faire remonter en puissance notre Armée, à commencer par nos Forces terrestres ; c’est d’offrir nos bons offices ; bref, c’est d’en revenir à une neutralité permanente et armée. Pour notre sécurité.