Les événements au Japon, en particulier dans la centrale nucléaire de Fukushima, ont entraîné en Suisse une véritable panique générale organisée. Des politiciens de presque tous les partis exigent…
Les événements au Japon, en particulier dans la centrale nucléaire de Fukushima, ont entraîné en Suisse une véritable panique générale organisée. Des politiciens de presque tous les partis exigent actuellement l’abandon immédiat de l’énergie nucléaire ou, du moins, des scénarios à ce sujet. Au milieu de ces histoires d’épouvante et de cette hystérie, massivement encouragées par les médias on oublie complètement les questions importantes de la garantie de l’approvisionnement et des coûts énergétiques futurs.
Il convient par conséquent de garder son calme et d’attendre une analyse claire des événements, plutôt que de perdre la tête et d’exiger des mesures qui ne pourraient par la suite pas être mises en œuvre.
Du réalisme plutôt que des coups médiatiques
Quand on observe les revendications, elles semblent illimitées: arrêt des centrales nucléaires, renforcement de l’énergie hydraulique, abandon des moyens de défense contre les énergies alternatives dans le domaine de la protection du paysage et de la nature; elle s’étend jusqu’à l’augmentation des contributions en faveur des énergies renouvelables. Les partis de gauche se disent favorables à la construction de nouvelles centrales au gaz ou au charbon, bien que ces deux sources d’énergie génèrent des émissions considérables. La protection de l’environnement est jetée aux oubliettes, tout ceci dans le but ultime rouge-vert: l’abandon total du nucléaire, par n’importe quel moyen. L’activisme à court terme, les actes irréfléchis ainsi que la peur sont toujours mauvais conseillers. Avant de prendre des mesures, il faut analyser la situation et connaître tous les faits. Tout le reste n’est que populisme, sur le dos de la population et de milliers d’entreprises, qui ont besoin d’un approvisionnement électrique sûr et abordable.
Aucune alternative à l’énergie atomique en perspective
Les débats et revendications actuels omettent ces points. À l’avenir, les besoins électrique en Suisse ne vont pas diminuer mais augmenter et il en ira de même dans les pays voisins. Outre l’immigration massive des dernières décennies, les efforts pour réduire la consommation de pétrole sont une raison de l’accroissement de la consommation électrique. Si l’on souhaite se libérer du pétrole et par là même réduire notre dépendance envers des États tiers, il est nécessaire de disposer d’une autre source d’énergie, en l’occurrence l’électricité. Exiger un abandon du nucléaire est téméraire. En effet, la question qu’il faut se poser est celle de l’alternative à l’énergie atomique. Que se passerait-il, si les centrales nucléaires disparaissaient? Quelles énergies remplaceront la part de 40 % que représente cette énergie dans le mix de l’électricité? Elle pourrait partiellement être compensée par la construction de centrales électriques au gaz et au charbon. Du point de vue environnemental, ce serait clairement préjudiciable, parce que ces types de centrales génèrent des émissions massives de CO2. Abstraction faite de cet aspect, nous nous soumettrions à la dépendance de pays qui ont par le passé utilisé ces matières premières comme des armes. On se souvient bien de la démonstration de force de la Russie, qui a ces dernières années plusieurs fois fermé le robinet du gaz dans le cadre du conflit avec l’Ukraine. Les énergies renouvelables telles l’énergie solaire et éolienne peuvent apporter leur contribution mais leur potentiel reste limité. Reste encore l’accroissement des capacités des centrales hydroélectriques. L’énergie hydraulique est presque entièrement exploitée, sans compter que son potentiel a été davantage restreint au cours des dernières années, que ce soit par le Parlement, à travers des réglementations drastiques, ou par les recours des associations de protection de l’environnement et de la nature. La dernière possibilité est l’importation de courant. Cette solution peine à convaincre lorsqu’on y regarde de plus près, d’une part parce que la capacité du réseau est trop faible et que là aussi, il existe une résistance contre son développement, d’autre part parce que chaque pays a lui-même besoin de son énergie.
Conséquences de taille pour la protection du climat et de l’environnement
Ceux qui veulent abandonner l’énergie atomique doivent aussi remettre en question le débat sur les mesures de protection du climat et de l’environnement. On ne peut avoir le beurre et l’argent du beurre. Il est irritant et révélateur que les partis qui exigent avec véhémence un abandon immédiat du nucléaire soient ceux qui prônent les réductions de CO2. Il sera impossible d’atteindre les objectifs de réduction adoptés par le Conseil des États sans la production électrique exempte de CO2 des centrales nucléaires. Illustration: la plus grande centrale au charbon du monde rejette chaque année, avec ses 41,3 millions de tonnes, plus de CO2 que la Suisse toute entière! Une centrale moderne avec turbine à gaz à cycle combiné émet, pour une puissance équivalente à celle de la centrale nucléaire de Mühleberg, 700’000 tonnes de CO2 par an.
Pertes de postes de travail et dépendance accrue vis-à-vis de l’étranger
Un abandon immédiat entraînerait des pénuries de courant et des augmentations de prix considérables. Ceux qui ont assisté au tollé de la population face aux augmentations de ces dernières années, fermement soutenus par les mêmes médias qui aujourd’hui prêchent en faveur de l’abandon, peuvent imaginer ce qui arriverait dans un tel scénario, bien plus grave. Une forte augmentation aurait aussi des conséquences de grande ampleur sur l’industrie, qui a besoin de disposer d’énergie à prix avantageux. Une électricité abordable était l’un des seuls avantages liés au lieu d’implantation dont nous disposions face à l’étranger. En cas d’augmentation des prix, la place économique suisse perdrait sa compétitivité. Des branches à forte consommation énergétique telles l’industrie du ciment, de l’acier, du papier mais aussi du recyclage seraient fortement touchées. Outre le risque de suppression de places de travail, la Suisse serait dépendante de l’étranger dans des secteurs centraux.
Croissance démographique en tant qu’élément supplémentaire
Un autre point régulièrement passé sous silence dans le débat est celui de l’immigration. La population en Suisse a augmenté de 1,1 million de personnes depuis 1990. L’augmentation de la consommation énergétique est également une conséquence de la croissance démographique. Les transports publics, les infrastructures, ainsi que d’autres applications ont besoin de grandes quantités de courant. Des milliers de places de travail dépendent d’un approvisionnement électrique régulier. Un abandon aurait des répercussions considérables sur la vie quotidienne, créant un risque latent de pénuries de courant et un fort renchérissement de l’entretien des ménages.
Des actes plutôt que des mots
La politique énergétique future a besoin de directives claires et de transparence. Les opposants à l’énergie atomique doivent apporter des réponses concrètes. Il est inconcevable de s’opposer à toute forme d’énergie. Le double discours politique de la gauche doit cesser. Dans le débat à venir sur l’énergie, il faudra examiner les avantages et inconvénients de chaque source d’énergie, sans œillères idéologiques. Les coups médiatiques motivés uniquement par des desseins politiques et entraînant de graves dommages collatéraux doivent être clairement écartés.
39.3% de la production électrique provient des centrales nucléaires, soit la plus grande proportion. Un renoncement de l’énergie nucléaire nuira à l’offre et aura pour conséquence une augmentation des prix du courant.