éditorial

Aider, oui, mais pas au détriment de nos enfants

La Conseillère fédérale Karin Keller-Sutter s’attend à un accueil en Suisse de plus de 50’000 personnes déplacées par la guerre en Ukraine d’ici juin 2022, principalement des femmes et des enfants. Bien que le statut de protection « S » soit clairement orienté vers un retour, à terme, dans le pays d’origine, ces réfugiés doivent être intégrés. La mise en œuvre de cette intégration incombe aux cantons et aux communes ; comme c’est souvent le cas dans le domaine de l’asile et de la migration ce sont ces derniers qui doivent « servir la soupe dans laquelle la Confédération les a plongés ».

Martina Bircher
Martina Bircher
conseillère nationale Aarburg (AG)

« Nous ne pouvons guère affronter cette crise avec uniquement de la bonne volonté. »
Dans ce contexte, où la Confédération s’attend à l’accueil de 50’000 réfugiés de guerre ukrainiens d’ici le mois de juin déjà, la déclaration de Madame Kathrin Scholl, présidente du corps enseignant du canton d’Argovie, s’apparente à un appel à l’aide. Nous doutons toutefois qu’il soit entendu à Berne ; la Conseillère fédérale Karin Keller-Sutter promet en effet aux personnes déplacées par la guerre un accueil « non-bureaucratique », intégration comprise. Cette annonce doit raisonner comme trop familière aux autorités de certaines communes : en effet, la pratique d’accueil extrêmement généreuse des migrants économiques de tous les pays fait déjà exploser les coûts sociaux et surcharge les écoles.

Dans le cas des réfugiés ukrainiens, le défi des écoles est de taille : du jour au lendemain, elles doivent accueillir des milliers d’enfants et d’adolescents qui ne maîtrisent ni notre alphabet, ni l’une de nos langues nationales. De plus, nombre de ces enfants ukrainiens risquent d’être traumatisés par la situation qu’ils rencontrent.

A Berne, la Conseillère fédérale Karin Keller-Sutter pense que cela est facilement gérable. Lors de la crise migratoire de 2015, des milliers de Syriens sont venus en Suisse, nous dit-elle. Les écoles pourraient s’appuyer sur ces expériences et seraient donc équipées. Or, cette comparaison est malhonnête : en 2015, seuls 1300 enfants âgés de 0 à 14 ans sont arrivés en Suisse. Aujourd’hui, ce sont probablement des dizaines de milliers d’enfants ukrainiens que les écoles suisses devront accueillir.

La qualité de l’éducation encore un peu plus mise à mal

De nombreuses écoles sont d’ores et déjà à bout de souffle en raison de l’immigration de masse et de l’enseignement « intégratif ». Il n’est pas rare de voir des classes dans lesquelles jusqu’à 80% des enfants ne parlent aucune de nos langues nationales. Les barrières culturelles rajoutent de la complexité à l’enseignement et constituent un véritable défi pour les enseignants comme pour les enfants. De la naïveté de la Conseillère fédérale Karin Keller-Sutter en matière d’immigration découle une souffrance supplémentaire de la qualité de l’éducation.

Il est bien entendu évident que la Suisse offre une protection aux réfugiés ukrainiens arrivant sur son territoire. Il est toutefois inacceptable que le Conseil fédéral mette le bien-être de la population suisse sur le banc de touche. Au lieu d’envoyer les enfants ukrainiens dans les écoles suisses, nous devrions permettre la création de classes dans leur langue nationale, avec un enseignement qui pourrait être dispensé par des enseignants réfugiés. Cela serait plus judicieux à tous égards, ce d’autant plus que le statut de protection « S » est orienté vers un retour, à terme, au pays.

Martina Bircher
Martina Bircher
conseillère nationale Aarburg (AG)
 
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