La Suisse était un pays heureux. Rien ne pouvait nous arriver. Surtout pas une guerre (ça, c’est pour les autres !). Jusque dans les rangs « bourgeois », on en venait à croire notre armée inutile. Et voici que tout le Pays la découvre indispensable.
Cette armée, on l’a déplumée. On a laissé fondre ses budgets et ses effectifs, démanteler ses infrastructures. On n’a pas veillé à moderniser à temps ses systèmes, armements et matériels. On a dénigré une organisation, des méthodes et un fonctionnement jugés dépassés. Mais quand ça va mal, sur qui, seulement, le Pays peut-il compter ? Chère Armée… Oui, à l’heure où un virus venu de Chine menaçait de saturer notre système sanitaire et de décimer notre population, c’est cette assurance dont trop de Suisses ne voulaient plus payer les primes que nous avons appelée.
Mal-aimée, décriée, à l’appel de son nom, notre armée a répondu « présent ». Dans la panique qui a saisi le Pays, elle a immédiatement donné un sentiment rassurant d’organisation, de calme et d’efficacité. Grâce aux visionnaires qui ont réintroduit et entraîné la mobilisation, des milliers de soldats, de sous-officiers et d’officiers pour la plupart de milice, arrachés à leur famille et à leur travail, ont pu être mis sur pied en quelques heures, puis engagés avec l’équipement adéquat en appui au système sanitaire civil et au Corps des gardes-frontière (un tour de force, soit dit en passant, pour notre armée de milice). Le Pays a redécouvert que lorsque les moyens civils ordinaires ne suffisent plus, il n’a qu’une réserve : l’armée.
D’aucuns, il y a peu, préconisaient le « tout cyber ». Personne, toutefois, n’avait imaginé qu’en quelques semaines, un virus paralyserait notre pays comme le reste du monde. On redécouvre ainsi l’utilité d’une armée pour soutenir notre système sanitaire ou encore pour contrôler nos frontières. Et demain ? Eh bien justement, un autre élément essentiel que nous redécouvrons, c’est que l’incertitude est la seule certitude ; c’est qu’aucun pays ne peut anticiper toutes les menaces. Pour être prêt, il n’y qu’une seule recette, éternelle : se préparer aussi aux menaces les plus dangereuses et particulièrement à la pire, la guerre. C’est évidemment là que réside le cœur de compétence de toute armée. C’est pour cela qu’elle développe une culture de discipline et de fidélité à la mission, des comportements standards, des processus de planification et de conduite. Ce socle qui, seul, permet de faire face à des circonstances nouvelles ou imprévues, notre armée a su le conserver. Voilà précisément pourquoi elle était prête. C’est aussi parce qu’elle a su rester ce système global qui ne vaut, même pour des engagements particuliers, que par la somme cohérente et organisée des capacités multiples qu’elle est en mesure d’offrir, aujourd’hui sanitaires et de contrôle des frontières et demain, qui sait ?
Alors oui, une armée, mais une vraie armée, une armée complète, ça sert à quelque chose, aujourd’hui encore, plus que jamais. Essayons de nous en souvenir, parlementaires et citoyens, le jour où nous serons appelés à voter pour lui donner les moyens dont elle aura encore besoin, à l’avenir, pour le Pays, pour nous finalement.
Pour l’heure, honneur à ces milliers de soldats, de sous-officiers et d’officiers qui ont quitté leur famille et leur travail pour répondre à l’appel du Pays !