Le domaine de l’asile en Suisse est confronté à un état d’urgence, en particulier en ce qui concerne la dissuasion, la diplomatie, l’administration et l’application des mesures. Il en ressort que…
Exposé de Colette Adam, conseillère d‘Etat , Derendingen (SO)
Le domaine de l’asile en Suisse est confronté à un état d’urgence, en particulier en ce qui concerne la dissuasion, la diplomatie, l’administration et l’application des mesures. Il en ressort que la Suisse a abandonné sa souveraineté en matière d’asile. Il faut agir, et vite. Il nous faut des autorités en charge de l’immigration plus efficaces, une prévention crédible sur place, la mise en œuvre des accords de réadmission et davantage de moyens de pression sur les pays d’origine des requérants. Ces mesures sont indispensables – en plus du durcissement des lois sur l’asile et sur les étrangers demandé par l’UDC dans le but de réduire le nombre de demandeurs d’asile.
1. Besoin urgent de dissuasion
Nous devons nous défaire de notre image d’Epinal du requérant craignant pour sa vie et traversant seul les déserts, les fleuves et les montagnes. Nous devons réaliser qu’aujourd’hui la majorité des demandeurs d’asile sont dirigés en Suisse par des organisations criminelles de passeurs, professionnelles et efficaces. Ces bandes exploitent sans scrupules de nouveaux clients et de nouvelles voies de passage dans ce commerce extrêmement lucratif. La Confédération, quant à elle, ne fait rien sur place ou presque, pour dissuader et empêcher ces activités criminelles.
2. Urgence administrative
L’autorité fédérale en charge de l’immigration se contente depuis une année de faire preuve d’une mentalité singulière de fonctionnaire. Elle se montre incapable de mettre sur pied un plan net et d’orienter ses moyens de telle sorte que la durée du traitement des demandes d’asile reste au moins constante. Dans les faits les procédures deviennent de plus en plus longues, ce qui attire davantage de passeurs. A l’issue de longues procédures les rapatriements ne sont presque jamais possibles. Une administration compliquée et lente se fait ainsi la complice involontaire des passeurs et de leurs complices dans certains milieux d’avocats et d’œuvres d’entraide.
3. Urgence dans l’application des mesures
Les cantons se sont habitués aux temps heureux de ces dernières années, où les demandes d’asile ont connu un fléchissement. Eux aussi ont réduit les infrastructures dévolues à l’asile, ce d’autant que la Confédération a repris il y a plusieurs années déjà une partie des responsabilités importantes des cantons dans le domaine de l’asile. A l’automne passé deux conseillers fédéraux PBD ont réussi à faire partir en fumée un accord entre le DFJP et le DDPS concernant l’utilisation des structures d’hébergement du DDPS. On s’est passé la patate chaude si longtemps, que le DFJP a jugé plus simple de rappeler les cantons à leurs responsabilités antérieures en matière d’asile. En l’absence de mesures et d’engagements concrets de la Confédération les cantons se montrent aujourd’hui peu enclins à reprendre ces responsabilités; même si, avec le règlement sur l’aide d’urgence, les coûts sociaux engendrés par les requérants déboutés, mais pas expulsables seraient supportables. Indépendamment de l’attitude des cantons, une grande partie des requérants déboutés ne quitteront plus la Suisse. L’application des décisions de renvoi est problématique et la mise en œuvre des accords de réadmission se heurte souvent à l’intransigeance des pays d’origine. C’est pourquoi l’UDC demande que l’on supprime l’aide au développement ainsi que d’autres aides aux Etats récalcitrants.
Les poids financier de l’asile en Suisse
La Suisse va devoir continuer à supporter des coûts de plus d’un milliard de francs – et encore je n’ai pas fait de calcul global – si elle ne réussit pas à faire baisser le nombre de demandeurs d’asile qui frappent à sa porte. Durant le premier trimestre de 2008, 2786 nouvelles demandes ont été déposées. Alors que les trois premiers mois de cette année ont vu ce nombre exploser à 4938. Cela représente une augmentation de 77%. Un demandeur d’asile passe en moyenne 4,7 ans en Suisse et occasionne durant ce laps de temps des coûts d’environ 62’000 francs (il s’agit là d’une estimation prudente). Cela signifie que toutes les demandes d’asile réunies coûtent à la Confédération et aux cantons quelque 950 millions de francs par an (il s’agit à nouveau d’une estimation prudente). Si l’on considère que les communes doivent encore financer les coûts de l’hébergement, la barre du milliard de francs est allègrement dépassée. Il n’est donc pas exagéré en l’état de parler aussi d’une urgence financière.
Schengen/Dublin parasites?
Les Accords de Schengen et de Dublin étaient sensés réduire le nombre de demandes d’asile en Suisse. La Suisse n’a pas de côtes et par la route elle n’est atteignable qu’à travers des Etats partenaires. Cela aurait dû signifier une baisse constante des demandes jusqu’à tendre vers zéro. Pourtant les faits indiquent le contraire. Les requérants arrivent tout de même chez nous parce que d’autres Etats de Schengen/Dublin les laissent passer, sans qu’ils aient besoin de déposer une demande d’asile chez eux. Cette situation est contraire aux accords.
Et il n’est pas exclu que nos « partenaires » de l’espace Schengen/Dublin nous envoient davantage de requérants à l’avenir. C’est un cas d’école du désavantage d’être un petit Etat partie à un accord supranational. Si les partenaires puissants ne respectent pas leurs engagements contractuels, le petit Etat est simplement mis devant le fait accompli. Les demandeurs d’asile viennent donc chez nous malgré les Accords de Schengen/Dublin, c’est à la Suisse d’en supporter les coûts et une fois installés la Suisse n’a plus aucun moyen de renvoyer les requérants déboutés en dépit de tous les accords et de toutes les mesures.
Bilan: toutes les mesures prises à ce jour ne servent à rien, s’il manque la volonté d’une mise en œuvre stricte. Cette volonté fait défaut à l’Office fédéral de la migration, ce d’autant plus qu’aucune pression d’en haut ne s’exerce sur lui. Pourtant c’est exactement ce qu’il faudrait aujourd’hui, afin que les mesures introduites dernièrement portent leurs fruits de manière chiffrée.