En tant que conseiller aux Etats je suis engagé par définition au service du peuple ET des cantons. Le 9 février 2014 le peuple et les cantons ont dit oui à l’initiative populaire "contre l’immigration de masse". La participation a atteint un record avec 55,8%. C’est dire qu’une forte proportion du peuple a réfléchi à cet objet et s’est rendue aux urnes. 12 cantons et 5 demi-cantons ont approuvé le projet. Il ne s’agit donc pas d’un résultat de hasard.
La campagne de votation était extrêmement intense. Il était d’emblée clair qu’une gestion autonome de l’immigration exige des mesures contraires à l’accord de libre circulation conclu avec l’UE. Le Conseil fédéral et tous les adversaires d’une gestion autonome de l’immigration ont mis en garde contre cette conséquence et les explications de vote du gouvernement en ont aussi clairement fait état.
C’est donc en pleine conscience de certaines conséquences négatives que le peuple a pris cette décision. S’il a fait ce choix, c’est en raison des mauvaises expériences faites avec l’accord de libre circulation et surtout parce que l’immigration consécutive à ce traité est dix fois plus élevée que les pronostics du Conseil fédéral. La votation sur l’initiative populaire "contre l’immigration de masse" était donc aussi une votation populaire sur l’accord de libre circulation. Gérer l’immigration de manière autonome, c’est agir sans l’UE!
Les fausses promesses du Conseil fédéral
Après la votation sur l’initiative populaire "contre l’immigration de masse", les conseillers fédéraux se sont dans un premier temps donné des airs de bons démocrates et de bons perdants: "L’article constitutionnel sur la limitation de l’immigration doit être appliqué strictement", a déclaré la ministre de la justice à diverses occasions (par ex., dans le quotidien "Aargauer Tagblatt" du 12 septembre 2015. Quelques mois plus tard, le ton était déjà nettement moins affirmatif: "Nous progressons pas à pas sans perdre de temps, mais aussi sans précipitation", a affirmé devant les médias Simonetta Sommaruga en février 2015, alors présidente de la Confédération.
Puis, la machine à communiquer de l’UE a commencé à agir sur la politique suisse. Avec le résultat que le conseiller national Gerhard Pfister, président du PDC, a fait le constat suivant dans un entretien accordé au journal dominical "Schweiz am Sonntag" du 29 mai 2016: "Nous devrions maintenant nous concentrer sur une rapide application à l’intérieur du pays et ne plus attendre dans l’espoir que l’UE nous fasse des concessions. Nous devons aller jusqu’au bout."
Lorsque le plénum du Conseil national a ouvert ce dossier, la majorité du Parlement était manifestement "cuite à point". On sait aujourd’hui qu’il n’est absolument rien resté de la "stricte application" de l’article constitutionnel.
Trop éloigné de tout compromis
Il existe des situations dans la vie où on ne peut plus trouver de compromis. Il semble que nous soyons dans un tel cas. Les médias nous ont appris que la discussion de la Commission des institutions politiques du Conseil des Etats s’est basée sur la "solution zéro" du Conseil national. On veut encore durcir la décision du National, ont annoncé quelques collègues de la Petite Chambre.
Les prétendus "durcissements" rendus publics jusqu’ici consistent en réalité en des mesures d’accompagnement supplémentaires qui ne feront certainement pas plaisir aux entreprises. Le droit donné aux ORP d’attribuer aux employeurs des personnes en quête d’un emploi, l’obligation faite aux employeurs d’inviter les chômeurs à un entretien de présentation et de justifier par écrit le refus d’engager un travailleur domicilié en Suisse sont autant de mesures bureaucratiques qui compliquent la mise au concours de postes vacants. Et qui, de surcroît, discriminent les personnes qui ne se sont pas annoncées à un ORP, mais qui cherchent simplement à changer d’emploi. Ce n’est certainement pas avec des mesures de ce genre que l’on baissera l’immigration et que l’on résoudra les problèmes que l’immigration de masse pose quotidiennement au peuple suisse.
La "proposition Föhn" répond au mandat constitutionnel
Ma proposition d’application de l’initiative "contre l’immigration de masse", qui sera déposée à la Commission des institutions politiques du Conseil des Etats, est la seule solution constitutionnellement conforme dont nous disposons aujourd’hui. Elle sera soutenue par des propositions supplémentaires de Thomas Minder, mon collègue au Conseil des Etats.
Ce concept est le seul à appliquer le mandat constitutionnel d’une gestion autonome de l’immigration avec des plafonds et des contingents que le peuple et les cantons ont approuvé. En tant que conseiller aux Etats, j’ai l’obligation de m’y tenir et je le ferai.
Les autres solutions proposées privent la Suisse de sa souveraineté. Et c’est bien ce que je veux empêcher.
> Proposition Föhn d’application de l’initiative "contre l’immigration de masse"