La Suisse romande et/ou le canton du Tessin n’auront plus jamais un siège au Conseil fédéral. Leur force électorale est trop faible. Cette situation est injuste. Voilà un argument qui est…
par Christoph Neuhaus, conseiller d’Etat du canton de Berne
La Suisse romande et/ou le canton du Tessin n’auront plus jamais un siège au Conseil fédéral. Leur force électorale est trop faible. Cette situation est injuste. Voilà un argument qui est régulièrement revenu dans cette campagne. Il est vrai que l’on pourrait discuter longuement de la justice ou de l’injustice de la répartition des sièges entre les cantons ou les régions. Vous connaissez les statistiques, vous savez quels cantons ou régions ont été surreprésentés ou au contraire sous-représentés à l’exécutif national. Cette situation est-elle juste? Le prétendu problème de reproduire pour ainsi dire les régions du pays au sein du Conseil fédéral peut parfaitement être résolu.
Le canton de Berne compte près d’un million d’habitants, dont 54 000 sont de langue maternelle française. Comment tenir compte équitablement de cette minorité? Pour le Grand Conseil, donc le parlement cantonal, il existe dans la circonscription Bienne-Seeland une règlementation garantissant des sièges à la population francophone. Les articles 39 et 40 de la loi bernoise sur les droits politiques précisent le mode de calcul. La partie francophone de la population bernoise bénéficie également d’un siège garanti à l’exécutif cantonal. Un représentant de la région francophone du canton siège toujours dans ce gouvernement de sept membres. Si les élections cantonales ne confirment pas ce principe, le septième conseiller d’Etat de langue allemand élu doit céder son siège au candidat francophone. Cette règle est inscrite dans la constitution cantonale depuis 1994, mais il n’a jamais été nécessaire de l’appliquer. Les partis politiques se sont toujours organisés en fonction de cette règle en lançant les candidatures les plus prometteuses du Jura bernois.
Pour garantir que la candidature favorisée par le Jura bernois s’impose effectivement, la répartition des voix est soumise au principe de la moyenne géométrique: les voix obtenues par les candidats francophones sont comptées séparément pour le Jura bernois et la totalité du canton, puis multipliées ensemble. Ensuite on tire la racine carrée du résultat de cette multiplication.
Par sa structure, mon canton est de plusieurs points de vue un modèle réduit de la Suisse. Nonobstant les mises en garde des adversaires de ce projet, je ne vois pas pourquoi un système qui a fait ici ses preuves depuis des décennies ne pourrait pas fonctionner au niveau suisse. En outre, ce système électoral n’a absolument pas déstabilisé politiquement le canton comme le prévoyaient les critiques sans pouvoir fonder sérieusement leurs arguments.