La vie politique est rythmée de combats à court, moyen et long terme. Sans l’ombre d’un doute, la préservation d’une neutralité crédible et fructueuse est un objectif stratégique à long terme d’importance majeure pour la Suisse. A l’interne, il s’agit d’une garantie de stabilité pour nos concitoyens. A l’externe, c’est l’apport de notre pays pour la Paix et la stabilité globale.
« Nous voulons tenir pour rester maîtres chez nous quoi qu’il arrive ». Par ces mots adressés à la Société suisse des Sous-Officiers en mai 1943, le Général Guisan concluait une allocution centrée sur l’importance de préserver nos acquis. Allocution durant laquelle il avait largement rappelé l’importance de la neutralité pour notre pays, rappelant que « la guerre se déroulera toujours plus ou moins à proximité de nos frontières ».
Aujourd’hui, ces paroles reprennent tout leur sens, alors que deux guerres impliquant au moins un Etat démocratique ont éclaté successivement à quelques heures de vol de notre pays. Ces conflits mettent à mal nos institutions : les pressions exercées sur notre parlement sont fortes et la majorité de centre-gauche pousse toujours plus pour que nous prenions parti.
Rendez-vous compte : cette même gauche pacifiste qui a toujours combattu notre industrie de l’armement et souhaite la suppression de l’armée s’engage aujourd’hui pour des exportations d’armes et un soutien militaire accru ! Le problème, Mesdames et Messieurs, c’est que lorsque l’on met les doigts dans l’engrenage des alliances, il devient compliqué de s’arrêter.
La Suisse ne peut pas apporter la victoire, mais la Paix
La neutralité, c’est la garantie que la Suisse peut offrir sur la scène internationale. Il faut être réalistes : lorsqu’un conflit oppose des grandes puissances mondiales et mobilise le complexe militaire et industriel de l’OTAN, de l’Union européenne et d’autres puissances de premier ordre, nous devons reconnaître que ce n’est pas la Suisse qui sera capable de changer la donne. Vous m’avez entendue : la Suisse est trop petite pour offrir la victoire. En revanche, elle peut offrir la paix, ou pour le moins un terrain de négociations et une expertise reconnue visant à rendre possible la résolution des conflits.
Alors oui, me direz-vous, on entend ça et là que la neutralité n’est pas incompatible avec tel régime de sanctions et avec telle livraison indirecte d’armes. Ne vous y trompez pas : ce qu’oublient les experts auto-proclamés de l’Etat de droit, c’est que pour être efficace, il ne suffit pas que la neutralité corresponde à des traités légaux. Pour produire du fruit, la neutralité doit être crédible. Or, aujourd’hui, plus personne ne croit que la Suisse se comporte de manière neutre, à l’exception notable de certains groupes parlementaires ou fonctionnaires fédéraux.
Comment peut-on prétendre que la Suisse agit de manière neutre alors que les parties aux conflits refusent nos bons offices ? Comment peut-on affirmer que notre neutralité est efficace quand les parties au conflit s’écartent de notre table des négociations ?
Cela ne peut plus durer ! Nous ne pouvons pas prêcher la neutralité tout choisissant un camp. La neutralité suisse a apporté à notre pays la sécurité, le respect, la prospérité et la crédibilité en matière de politique étrangère. C’est pourquoi nous devons maintenant soutenir de toutes nos forces l’initiative sur la neutralité. Seul l’ancrage des principes de la neutralité dans la Constitution garantira que la Suisse reste un pays indépendant, souverain, stable et ouvert sur le monde.
Cela, Mesdames et Messieurs, c’est ce que nous pouvons offrir au monde. Surtout, c’est ce que nous devons offrir à nos concitoyens.
