Pour compléter les déclarations des orateurs précédents, je vous présente une série de mesures concrètes qui apporteront des économies massives à l’assurance-invalidité. Une importante remarque…
Exposé de Marcel Scherer, conseiller national, Hünenberg (ZG)
Pour compléter les déclarations des orateurs précédents, je vous présente une série de mesures concrètes qui apporteront des économies massives à l’assurance-invalidité. Une importante remarque initiale: le montant des rentes ne sera pas changé. Mais au fil des ans, de nombreuses dépenses se sont institutionnalisées dans l’AI. Il est grand temps de s’interroger sur le bien-fondé de certaines d’entre elles et, en cas de besoin, d’y apporter des corrections.
Premier mesure: les moyens auxiliaires
L’AI dépense chaque année plus de 250 millions de francs pour des moyens auxiliaires. La concurrence fait défaut dans ce secteur régi par des listes de prix et par l’obligation de privilégier les marchands suisses. Des cas de prix surfaits particulièrement choquants ont été rendus publics comme par exemple une paire de chaussures spéciales pour 4500 francs, une paire de talons pour 414 francs ou des chaises roulantes qui, en Suisse, coûtent un tiers de plus qu’en Allemagne. Les appareils auditifs sont aussi généralement plus chers en Suisse qu’à l’étranger. Le système donne par ailleurs des impulsions contreproductives. On sait par exemple que des personnes de 60 à 65 ans ayant des problèmes d’ouïe sont incitées par leur médecin de famille à acheter un appareil auditif avant d’atteindre l’âge de la retraite, car cet accessoire est financé en grande partie par l’AI alors qu’une franchise plus élevée est appliquée aux personnes recevant l’AVS. D’une manière générale, on ne voit pas pourquoi l’Etat devrait acheter des appareils auditifs. Il serait beaucoup plus judicieux que l’AI verse une contribution calculée en fonction de la faiblesse auditive et que le choix de l’appareil et du centre de service soient réglés par les forces du marché. La correction de ces incitations contreproductives et le renforcement de la concurrence permettraient d’économiser quelque 80 millions de francs dans le seul secteur des moyens auxiliaires.
Deuxième mesure: les rentes d’enfants
Les personnes touchant une rente AI (ou des indemnités journalières) reçoivent pour chaque enfant un supplément de rente de 40% en l’absence de motifs de réduction. Un rentier AI avec deux enfants bénéficie donc de 1,8 rente AI; avec cinq enfants, il touche même trois rentes AI complètes. La somme moyenne versée par mois et par enfant se monte à 518 francs en moyenne alors que l’allocation « normale » pour enfant n’est que d’un peu plus de 200 francs par mois en moyenne suisse. Un rentier AI qui a des enfants touche donc aujourd’hui en moyenne plus que le double de l’allocation pour enfant due à une personne qui n’a pas de rente AI; dans certains cas particulier, la somme peut même atteindre le quintuple! De surcroît, la nouvelle loi sur les allocations familiales entrée en vigueur le 1.1.2009 accorde à tous les enfants de rentiers AI, subsidiairement et à côté de la rente pour enfant, le droit à une allocation familiale pour personne sans activité lucrative dans la mesure où le revenu ne dépasse pas 41 040 fr. Une réduction de moitié de la rente d’enfant serait donc justifiable et apporterait des économies de l’ordre de 300 millions de francs par an. En cas de besoin, les prestations complémentaires assurent un surcroît de revenu.
Troisième mesure: Vérification de l’efficacité des contributions
Quelque 1200 organisations reçoivent des contributions de l’AI pour un montant total d’environ 160 millions de francs via les organisations faîtières des associations d’handicapés. Les mandats de prestations de ces organisations doivent être vérifiés. Il convient à cet effet de se référer au principe de la normalisation (par exemple pour les cours et les camps) et d’exiger la présentation transparente des coûts supplémentaires dus effectivement aux handicaps. L’AI ne doit assumer que ces derniers. En outre, les contributions d’exploitation de l’AI aux associations d’aide aux handicapés doivent être soumises à la condition que ces associations engagent des bénéficiaires de rentes AI. Le potentiel d’économie dans ce domaine est de 40 millions de francs.
Quatrième mesure de la réforme: le montant des indemnités journalières
L’indemnité journalière, que l’AI verse pendant la durée des mesures professionnelles, est en règle générale beaucoup plus élevée que la rente AI. Elle atteint 80% du revenu réalisé précédemment, mais au maximum 80% du salaire maximum assuré selon la loi sur l’assurance-accidents. En plus de l’indemnité de base, l’AI verse une allocation pour enfants. En présence de mesures professionnelles importantes, l’indemnité journalière est même versée le weekend. Le montant des indemnités journalières pouvant représenter le multiple d’une rente et, de ce fait, dépasser largement le minimum existentiel, il faut examiner la possibilité d’adapter ces indemnités aux rentes. Cette réforme permettrait de faire des économies substantielles au niveau des indemnités journalières qui représentent aujourd’hui une charge de 330 millions de francs. Il y a là un potentiel d’économie de l’ordre de 60 millions de francs par an.
Cinquième mesure: adaptation des rentes exportées au pouvoir d’achat local
La cinquième mesure développée ici a déjà fait l’objet de nombreuses interventions parlementaires sans que le Conseil fédéral n’ait jugé bon de réagir: l’adaptation des rentes AI au pouvoir d’achat local. Il faut savoir que l’exportation de rentes AI à l’étranger est très mal perçu par la population suisse, d’autant plus que ces rentes sont versées sans que leur montant ne soit adapté au pouvoir d’achat du pays d’exportation. Il s’agit donc de prendre des mesures garantissant que les bénéficiaires de rentes AI à l’étranger ne soient pas privilégiés par rapport à ceux vivant en Suisse. En 2008, 42 018 rentes AI sur un total de 294 080 ont été exportées, ce qui représente une proportion de 14,2%. Il y a donc à ce niveau un authentique potentiel d’économie qui, de surcroît, est socialement tout à fait acceptable. Il est toutefois difficile de quantifier la baisse des coûts. Dans ses propositions, l’UDC part d’un volume d’économie d’au moins 20% des rentes exportées: un cinquième de 540 millions de francs égale à 96 millions. Le potentiel d’économie dans ce domaine devrait atteindre 120 millions de francs par an.
Mesures médicales concernant les infirmités congénitales
Aujourd’hui un tiers des enfants bénéficient de mesures médicales en raison d’infirmités congénitales. Ces interventions représentent une charge de 670 millions de francs pour l’AI. Il paraît cependant totalement irréaliste et disproportionné qu’un enfant sur trois souffre d’une infirmité congénitale. La liste de ces affections doit être élaguée et il y a lieu, par esprit de justice, d’exiger une participation modique aux frais par analogie aux dispositions de la LAMal. A ce niveau, le potentiel d’économie est de 110 millions de francs
A elles seules, les mesures présentées ici génèrent des économies largement supérieures à un demi-milliard de francs pour l’AI. Ajoutées à celles développées par les orateurs précédents, elles permettraient parfaitement d’assainir structurellement l’AI au niveau des dépenses. Notons aussi que le montant de ces économies est supérieur à ce que rapporte l’augmentation de la TVA.