L’UDC a perdu d’extrême justesse la bataille pour l’initiative populaire "contre les abus dans le droit d’asile". Ce résultat serré confirme néanmoins de manière éclatante que la politique d’asile…
Otto Laubacher, conseiller national, Kriens (LU)
La loi sur l’asile doit être révisée
L’UDC a perdu d’extrême justesse la bataille pour l’initiative populaire « contre les abus dans le droit d’asile ». Ce résultat serré confirme néanmoins de manière éclatante que la politique d’asile de la Suisse part dans une mauvaise direction, et cela depuis de nombreuses années. Bien que révisée à plusieurs reprises, la législation sur l’asile présente toujours des lacunes graves:
Il est évident qu’il faut agir. Même la conseillère fédérale Ruth Metzler l’a admis pendant la campagne de votation. Elle a avoué que l’initiative mettait en évidence des dysfonctionnements réels. Toutefois, elle s’est toujours référée au projet de révision de la loi sur l’asile pour annoncer la fin de cette situation inadmissible. Elle a promis que le Conseil fédéral mettrait en place une nouvelle loi sur l’asile qui combattrait efficacement les abus tout en maintenant la tradition humanitaire de la Suisse. Contrairement à la loi sur l’asile, ce projet permettrait de résoudre le problème par des solutions réalistes, a-t-elle annoncé.
Le projet du Conseil fédéral aggrave au contraire la situation
L’UDC soutient la tradition humanitaire de la Suisse. Mais la politique d’asile actuelle n’a aucun rapport avec cette tradition humanitaire. Le fait est que ce sont avant tout les requérants les plus astucieux qui parviennent à obtenir une autorisation de séjour. La révision de la loi sur l’asile proposée par Ruth Metzler n’y change rien. Au contraire, elle ouvrira les portes encore plus grandes aux abus. La disposition la plus désastreuse de cette réforme est le nouveau statut qu’elle instaure. En effet, les nouvelles admissions humanitaires et provisoires servent uniquement à réduire de manière superficielle les innombrables cas pendants. Ainsi, les requérants dont la demande a été refusée bénéficieront d’une admission proche de celle accordée aux vrais réfugiés. Même constat pour l’article 59 de la loi sur l’asile qui offre de nouveaux moyens d’obtenir un permis de travail. Les mêmes dispositions sur ce nouveau statut de séjour se trouvent également dans la LSEE, donc dans la loi sur le séjour et l’établissement des étrangers. Bien sûr, on affirme que ces permis ne sont accordés que pour 12 mois et qu’ils peuvent être retirés. L’expérience pratique a cependant montré qu’ils assurent en réalité un séjour durable en Suisse.
Parmi les autres points à critiquer, il faut citer l’absence de définition du standard de l’assistance ainsi que l’obligation de nommer une personne de confiance pour les requérants mineurs selon l’article 17 LAsi. Que l’on s’imagine cela dans la pratique: des jeunes font un long voyage à travers l’Europe pour arriver en Suisse; ils passent peut-être pour des adultes dans leur pays d’origine, mais, en Suisse, on est obligé de leur offrir une assistance tutélaire.
Il est en outre évident que la fameuse réglementation de l’Etat tiers proposée par le Conseil fédéral et si souvent citée dans la campagne de votation contient tant d’exceptions qu’elle n’apportera finalement rien du tout (art. 34 LAsi). De plus, elle est liée à une procédure compliquée. Manifestement, ses auteurs n’ont pas voulu imposer une réglementation efficace. Le seul but est de faire semblant de reprendre une disposition de l’initiative UDC sur l’asile. En réalité, la formulation de ces articles enlève toute efficacité à cette réglementation. Il ne faudra pas s’étonner de voir une multitude de requérants d’asile se découvrir une foule de parents et d’amis proches en Suisse.
Le fait que la nouvelle loi ne restreint pas les possibilités d’exercer une activité lucrative en Suisse révèle bien l’état d’esprit de ses auteurs (art. 43, al. 3bis et art. 61). De toute évidence, l’objectif n’est plus de combattre les abus dans le droit d’asile. Les autorités concernées se sont résignées depuis fort longtemps et sont prêtes à recruter de la main-d’œuvre par le biais de l’asile alors que le droit des étrangers exclut cette possibilité pour les pays non membres de l’UE. Notre Etat de droit prend un chemin inquiétant.
La révision de la loi sur l’asile n’est pas acceptable
L’UDC ne peut pas accepter cette révision de la loi sur l’asile. Ce projet ne reprend qu’en apparence certaines propositions de l’initiative sur l’asile, mais n’offre en réalité aucune base pour combattre les abus. Il s’agit simplement d’un acte de résignation devant la montagne de cas pendants. Cette attitude ne répond certainement pas à la volonté exprimée par le peuple le 24 novembre 2002. Le malaise devant ces dysfonctionnements est immense et si le peuple a fini par refuser l’initiative sur l’asile, c’est uniquement parce qu’il avait confiance dans la promesse du Conseil fédéral de promulguer une meilleure loi. Or, il n’en est rien. L’UDC rejettera donc ce projet. Ce texte doit être revu de manière à ce que la législation sur l’asile atteigne effectivement son objectif qui n’est en tout cas pas de faciliter la tâche des autorités. Compte tenu de l’évolution actuelle en matière de migration, la loi doit proposer des mesures efficaces contre les demandes d’asile abusives. Si le projet de révision ne répond pas à cette exigence, l’UDC n’hésitera pas à lancer un référendum.