La loi sur l’énergie et, avec elle, la Stratégie énergétique 2050 visent à transformer le système énergétique actuel de la Suisse. Il ne s’agit pas seulement de l’électricité, car tous les agents énergétiques sont touchés, donc aussi l’huile de chauffage, les carburants, le gaz, le bois, etc. On en déduira facilement que la majeure partie de la facture devra être payée par les propriétaires immobiliers et les locataires. Et cette addition pèsera lourd.
Les coûts de cette transformation de notre approvisionnement énergétique jusqu’en l’an 2050 se montent à quelque 200 milliards de francs, soit entre 5 et 7 milliards de francs par an. Cela fait la somme respectable de 3200 francs de dépenses supplémentaires par an pour un ménage de quatre personnes.
La loi sur l’énergie constitue la première phase de la stratégie énergétique. Elle y joue cependant un rôle primordial, car c’est elle qui fixe les objectifs de la politique énergétique pour les 30 années à venir. A noter en particulier son article 3 qui impose une réduction de la consommation d’énergie globale de 43%. Il est évidemment impossible de réduire de presque de moitié la consommation d’essence, d’huile de chauffage et de gaz simplement moyennant des voitures et des appareils ménagers plus économiques. C’est en réalité un sévère programme de rééducation étatique qu’on nous prépare.
Piège à dépenses pour les propriétaires immobiliers et les locataires
La hausse prévue de la taxe sur le CO2 frappera tout particulièrement les propriétaires immobiliers. Aujourd’hui déjà ils paient à ce titre 22 centimes par litre d’huile de chauffage. Dans son projet de système d’incitation en matière climatique et énergétique (SICE), le Conseil fédéral indique qui et comment il entend faire payer cette transformation de notre approvisionnement énergétique. Il songe tout simplement à quadrupler la taxe CO2 sur l’huile de chauffage en la portant à 89 centimes par litre[1]. Soit 67 centimes par litre de plus qu’aujourd’hui! Les propriétaires et locataires de maisons et d’appartements équipés d’un chauffage à huile en subiraient une hausse massive de leurs charges.
Mais ce n’est pas tout. Dans le projet de révision totale de la loi sur le CO2, qui a été mis en consultation jusqu’à fin novembre 2016, le Conseil fédéral prévoit l’interdiction pure et simple des chauffages aux combustibles fossiles dans les nouvelles constructions et dans les bâtiments existants[2] si les objectifs de réduction des émissions de CO2 ne sont pas atteints. Il propose également dans cette réforme de presque tripler la taxe CO2 sur les combustibles en la portant de 22 à 63 centimes par litre d’huile de chauffage. Le terrain est donc préparé pour le cas où le SICE serait refusé au Parlement: la taxe CO2 continuerait d’augmenter.
Le remplacement d’un chauffage à huile par une sonde thermique représente un investissement de l’ordre de 30 000 francs pour une maison familiale. Or, les chauffages à huile n’alimentent pas seulement des maisons individuelles, mais aussi des immeubles locatifs à plusieurs appartements, si bien que les coûts augmenteront d’autant plus. A ces dépenses il faut ajouter le prix de l’assainissement des enveloppes des bâtiments. Ces coûts ou du moins une bonne partie d’entre eux seront finalement reportés sur les locataires et pousseront à la hausse des loyers déjà passablement élevés.
Non à plus de prescriptions et de surveillance par l’Etat
L’article 55 de la nouvelle loi sur l’énergie ouvre grandes les portes à de nouvelles interventions de l’Etat: "…S’il apparaît que celles-ci (les valeurs indicatives) ne pourront pas être atteintes, il (le Conseil fédéral) propose simultanément les mesures supplémentaires qu’il estime nécessaires."
En particulier, le Conseil fédéral peut déclarer obligatoire le "Certificat énergétique cantonal des bâtiments (CECB)" ou l’installation d’un "Smart Meter" en éludant l’autonomie des cantons dans ce domaine. Dans le canton de Berne, le peuple a rejeté un CECB obligatoire. Mais la Confédération peut encore imposer de manière centrale d’autres parties du "Modèle de prescriptions énergétiques des cantons MoPEC".
Si les valeurs indicatives ne sont pas atteintes, il ne reste plus qu’un petit pas à faire en direction des interdictions de consommer et des mesures de rééducation imposées par l’Etat. Par exemple, interdire de laver ou de passer l’aspirateur en dehors des heures périphériques, interdire les ventilateurs en été ou encore limiter la température intérieure à 18 degrés en hiver, etc.
Le "Smart Meter" permettra de relever des données précises sur chaque consommateur d’électricité, donc aussi sur les habitudes de consommation de chaque locataire individuellement. La question de la protection des données personnelles n’est pas réglée à ce niveau.
La Stratégie énergétique 2050 est chère et impose de lourdes charges et contraintes aux propriétaires immobiliers comme aux locataires. Voilà pourquoi je refuse – et avec moi la Fédération immobilière du canton de Zurich – clairement la nouvelle loi sur l’énergie.