Les mois à venir seront d’une importance capitale pour l’agriculture suisse. La nouvelle PA22+ et les votations sur les initiatives pour l’eau potable et contre les pesticides, ainsi que l’examen de l’initiative contre les élevages intensifs sont autant de lourds défis à relever par l’agriculture suisse. Je le dis tout net: si la PA22+ et ces trois initiatives sont acceptées dans leur forme actuelle, l’agriculture telle que nous la connaissons aujourd’hui en Suisse aura bientôt disparu. La production agricole indigène baissera massivement, nous importerons encore plus de denrées alimentaires et les alpages ne seront plus entretenus. Des milliers de familles paysannes devront abandonner leur domaine et chercher de nouveaux emplois. Il ne faut pas que nous en arrivions là. Nous nous y opposons avec détermination!
Nous nous battons pour une politique agricole qui soutient la production de denrées alimentaires saines et saisonnières par des familles paysannes. Nous voulons une agriculture qui entretient nos alpages et nos beaux paysages, qui préserve le sol et les animaux et qui en prend soin. Chaque paysanne et chaque paysan le savent fort bien: faute d’un entretien soigneux, la production de mon sol et de mon écurie baissera. Les familles paysannes ont déjà fait de grands efforts dans le domaine de la protection de l’environnement. La PA actuelle impose déjà de lourdes contraintes à l’agriculture en ce qui concerne l’utilisation de produits phytosanitaires et d’antibiotiques. De nombreux programmes ont été mis en œuvre pour préserver la biodiversité, pour la mise en réseau, pour le bien-être des animaux, etc. Les paysans sont étroitement surveillés, ce dont on n’est souvent pas conscient dans la population. De nombreux contrôles – annoncés et par surprise – sont effectués chaque année dans les exploitations.
Je parle d’expérience, car je vis moi aussi dans une ferme où je m’occupe principalement des aspects administratifs et du jardin. Notre domaine dans le Toggenburg est une exploitation herbagère. Nous sommes donc moins concernés par les produits phytosanitaires, mais on nous demande par exemple de prouver que le contenu des sacs à fourrage à la grange provient effectivement de la maison dont le nom figure sur le sac. Il est aussi hors de question que les fourrages contiennent des éléments génétiquement modifiés.
NON aux initiatives pour l’importation – oui à une agriculture suisse responsable
Les paysannes et les paysans suisses produisent aujourd’hui déjà des denrées alimentaires saines. Ils sont d’ailleurs exposés aux lois de l’offre et de la demande sur le marché. Les clients exigent une qualité supérieure, aussi pour l’aspect extérieur des produits. Pour que, par exemple, les pommes aient exactement la forme et la couleur que souhaite le consommateur faisant ses achats au supermarché, l’utilisation de certains produits est indispensable. Cela fait des années que le recours à ces substances est sévèrement contrôlé. Chaque année, seuls un à deux pour-cent des échantillons prélevés par les autorités de contrôle dans la production suisse sont contestés. Pour les produits importés d’Asie, le taux de contestation atteint 30%. Mais les agriculteurs suisses ne se satisfont pas de leur bon résultat et cherchent constamment à l’améliorer.
Il faut que nous en soyons bien conscients: en cas d’abandon complet des produits phytosanitaires synthétiques – comme l’exige l’initiative contre les pesticides – la production suisse baisserait de 20 à 40%. De plus, la durée de conservation des produits baisserait. Cette initiative, tout comme celle sur l’eau potable sont en réalité des actions visant à augmenter les importations: au lieu de contrôler clairement les conditions dans lesquelles des denrées alimentaires peuvent être produites dans le pays, la Suisse serait contrainte d’augmenter massivement ses importations alimentaires. Nous ne voulons pas cela. La crise provoquée par la pandémie Covid-19 a révélé combien il est important que la Suisse conserve sa production alimentaire. De ce point de vue, la PA22+ est donc complètement déplacée: elle s’inspire trop des initiatives et provoque une baisse du degré d’autosuffisance. Cela ne peut pas fonctionner!
Utilisation de produits phytosanitaires: tous les acteurs, et non pas seulement les agriculteurs, doivent assumer leurs responsabilités
Nous autres gens de l’UDC, nous voulons sauvegarder l’agriculture suisse – et aussi nos nappes phréatiques. On a compris entre-temps qu’il fallait aussi intervenir dans d’autres domaines. Le « Plan d’action Produits phytosanitaires » lancé en 2017 en tient compte. Dans un geste d’obéissance anticipée, la commission de l’économie du Conseil des Etats a ouvert une consultation sur une initiative parlementaire réduisant le recours aux pesticides. Il s’agit d’une sorte de contreprojet aux initiatives populaires sur l’eau potable et contre les pesticides. L’UDC approuve en principe un projet de loi imposant un sentier de réduction avec des objectifs de diminution quantifiés afin de réduire les risques inhérents à l’utilisation de produits phytosanitaires synthétiques. Il faut cependant placer tous les utilisateurs de produits phytosanitaires devant leurs responsabilités. Nous refusons une focalisation unilatérale sur l’agriculture. Le Conseil fédéral doit veiller dès le départ à ce que toutes les branches professionnelles concernées s’engagent de manière ciblée sur le sentier de réduction et que la charge de cette opération ne soit pas imposée à un petit nombre d’organisations. L’utilisation de produits biocides doit elle aussi être incluse dans le programme de réduction des risques lancé par la Confédération. Nous nous opposons en revanche avec détermination à la taxe d’incitation que le Conseil des Etats prévoit dans sa dernière version. Le sentier de réduction doit être accompagné d’une stratégie de communication crédible de la Confédération afin de renforcer la confiance de la population.
Pour toutes ces raisons nous refusons avec conviction les deux initiatives et nous demandons le renvoi de l’AP22+ avec mandat au Conseil fédéral de la revoir de fond en comble.