La Suisse dispose globalement de réserves de terrains à bâtir d’une surface supérieure à 33 000 hectares, ce qui suffirait pour environ deux millions d’habitants supplémentaires. Néanmoins, les…
L’état de l’aménagement du territoire en Suisse
La Suisse dispose globalement de réserves de terrains à bâtir d’une surface supérieure à 33 000 hectares, ce qui suffirait pour environ deux millions d’habitants supplémentaires. Néanmoins, les communes ne cessent de dégager de nouvelles zones à construire.
Quelque 17 millions de mètres carrés de zone à bâtir (environ la surface de la ville de Genève) sont en friche et attendent, pour une bonne part, en vain une utilisation adéquate. Inversement, 1 m2 de terre cultivable est bétonné chaque seconde en Suisse. Si la surface habitée s’accroît chaque année de 27 kilomètres carrés, soit l’équivalent du lac de Brienz, c’est surtout à cause de l’augmentation de la population, mais celle-ci n’est pas la seule cause. Dans la majorité des cantons, la surface habitée s’accroît beaucoup plus rapidement que la population.
Le peuple suisse a exprimé à plusieurs reprises dans un passé récent son inquiétude face à ce développement, la dernière fois en acceptant l’initiative sur les résidences secondaires au niveau fédéral et, dans les cantons, en approuvant l’initiative sur les terres cultivables dans le canton de Zurich et la nouvelle loi sur l’aménagement du territoire et la construction dans le canton de Thurgovie. Le lancement avec succès de l’initiative populaire fédérale sur le paysage est une autre manifestation dans ce sens.
La révision partielle de la loi sur l’aménagement du territoire
Le texte soumis au vote est en fait le contreprojet du Parlement à l’initiative sur le paysage mentionnée plus haut. Il offre un moyen praticable de limiter la consommation de terres cultivables et répond ainsi à la principale exigence du document de fond de notre parti. Conformément à la Constitution, ce projet continue de fixer les grands principes de l’aménagement du territoire au niveau fédéral et laisse aux cantons la compétence de régler les détails. C’est la raison pour laquelle la Conférence des directeurs cantonaux de l’aménagement du territoire le soutient. Cette réforme reprend les instruments qui ont fait leurs preuves, soit le plan directeur au niveau cantonal et le plan de zone dans les communes. Il s’agit d’un contreprojet clair et net à l’initiative sur le paysage. Le comité d’initiative l’a bien compris puisqu’il a retiré son texte à condition que le contreprojet soit effectivement mis en vigueur.
Les arguments des adversaires reposent sur des malentendus
Contrairement aux craintes de ses adversaires, cette révision ne provoque nullement une raréfaction et un renchérissement des terrains à bâtir: selon l’art. 8a du projet de révision, le plan directeur doit garantir que les zones à bâtir ne dépassent pas les besoins prévisibles des quinze années à venir. Les cantons ont cinq ans pour adapter leur plan directeur dans ce sens. Pendant cette période, ils devront déterminer les besoins des quinze années suivantes. 5 ans de délai de planification plus 15 ans d’horizon de planification égale 15 à 20 ans, donc des réserves de terrains à bâtir pour cette durée. Il est évident qu’une échéance aussi lointaine ne conduit pas à une raréfaction et un renchérissement des surfaces à construire.
L’horizon de planification de quinze ans figure déjà dans l’article 15 de la loi actuelle sur l’aménagement du territoire. Dans les cantons qui ont respecté cette disposition, la planification selon la révision révélera sans doute la nécessité de dégager des surfaces à bâtir supplémentaires. En revanche, il sera peut-être nécessaire de sortir des terrains de la zone à bâtir dans les cantons où la loi a été interprétée de manière trop laxiste et où des réserves excessives ont été constituées.
L’argument « Non à de nouveaux impôts, taxes et redevances ou à une hausse des prélèvements en vigueur » est déplacé: la taxe sur les plus-values ne concerne que les zones à bâtir nouvellement définies. En cas de changement de zone, le canton ne doit pas prélever de taxe. On rappellera aussi que la plus-value d’un terrain placé nouvellement en zone à bâtir ne résulte pas d’une prestation du propriétaire, mais d’une décision de la commune. Le prélèvement sur la plus-value n’est pas un nouvel impôt. Il réduit le bénéfice fait sur un terrain placé en zone à bâtir. En revanche, la majeure partie du bénéfice reste acquise au propriétaire comme il se doit. En cas de vente du terrain, la taxe sur la plus-value peut être déduite du montant soumis à l’impôt sur les gains immobiliers. La plus-value n’est donc imposée qu’une seule fois.
Contrairement à l’impôt sur les gains immobiliers, le produit du prélèvement sur la plus-value n’entre pas dans la caisse générale des cantons, mais doit être affecté obligatoirement à des mesures d’aménagement du territoire, par exemple pour indemniser des propriétaires dont le terrain a été exclu d’une zone à bâtir, pour l’assainissement de zones industrielles abandonnées ou le démantèlement d’anciennes constructions dans la zone agricole.
L’argument « Non à de nouvelles atteintes à la propriété privée » est excessif dans ce cas précis: une zone à bâtir doit effectivement servir à la construction. Il faut éviter de dégager des terrains à construire pour constituer des réserves excessives. Lorsqu’un propriétaire foncier accepte que son terrain soit placé en zone à bâtir, il doit être conscient des obligations qui en découlent et ne pas simplement répondre oui en se disant qu’il n’a rien à perdre. Ce sont précisément ces réserves spéculatives de terrains à bâtir qui provoquent une raréfaction artificielle et un renchérissement des surfaces à construire. La révision contraint les cantons de prendre des mesures contre ces comportements, mais elle les laisse libre de définir les moyens qu’ils jugent nécessaires. L’imposition d’un délai pour construire sur un terrain constitue pour ainsi dire un recours ultime quand toutes les autres interventions ont été sans effet. Des terrains à bâtir non utilisés, donc ne répondant pas à un besoin réel, devront être rendus à l’agriculture dans les quinze ans à venir. Ce procédé garantit aux agriculteurs les surfaces de production nécessaires.
Quelles seraient les conséquences de l’initiative sur le paysage?
Un moratoire de vingt ans serait imposé pour la constitution de nouvelles zones à bâtir. Ce procédé punirait les cantons qui ont respecté les dispositions fédérales en vigueur et qui ont aménagé leur terrain avec prudence. Mais attention: même les cantons ayant dégagé de grandes réserves de terrains à bâtir auraient des problèmes de gestion, car ces réserves sont souvent au mauvais endroit.
L’acceptation de l’initiative sur le paysage provoquerait précisément ce nuisible déplacement de compétences des cantons vers la Confédération que nous refusons dans notre document de fond sur l’aménagement du territoire.
Cette initiative est nocive pour la population et l’économie. Elle provoque aussi de nombreuses incertitudes au niveau de l’application.
Je résume:
A côté d’un contrôle plus sévère de l’immigration, cette révision de la loi sur l’aménagement du territoire est absolument nécessaire pour limiter la consommation de terres cultivables. Les arguments des opposants reposent sur des malentendus et les craintes exprimées par ces milieux sont excessives. Le véritable danger proviendrait de l’acceptation de l’initiative sur le paysage qui, en cas de refus de cette révision, aurait de bonnes chances d’être acceptée par le peuple comme nous l’indiquent les expériences faites ces dernières années.
Recommandez donc courageusement le OUI au contreprojet et déposez également un OUI dans l’urne pour que nos précieuses terres cultivables soient utilisées à bon escient.