Un regard par-delà les frontières: ce qui se passe en Europe et les conclusions que nous pouvons en tirer

En 1990, la Suisse comptait encore 6,8 millions d’habitants. Aujourd’hui, trente ans plus tard, 8,6 millions de personnes vivent dans notre pays. Le quotidien zurichois « NZZ » a affiché le titre suivant (traduit de l’allemand): « La population suisse a connu une croissance de 26,2% depuis 1990, en grande partie à cause de l’immigration. »[1] Plus de deux millions d’habitants de la Suisse sont des étrangers alors que chaque année entre 40’000 et 50’000 personnes se font naturaliser. Depuis 1990, plus de 950’000 étrangers ont reçu le passeport suisse.[2]

Thomas Aeschi
Thomas Aeschi
conseiller national Baar (ZG)

Une comparaison du développement démographique de la Suisse avec celui de pays membres de l’UE donne des résultats étonnants. Les populations de la Bulgarie et de la Roumanie, Etats membres de l’UE, ont diminué depuis 1990 en chiffres absolus et dans le même ordre de 19 et de 15%. Celle de la Croatie, autre membre de l’UE, a également reculé, soit de 13% depuis 1990. Les populations de la Lettonie et de la Lituanie, également pays UE, ont même reculé, dans le même ordre, de 27 et 23%. Un tiers des Albanais ont quitté leur pays depuis 1990 et, enfin, le Kosovo a connu une émigration de 50% (!) de ses habitants, résultat qui ne nous surprend guère, nous autres Suisses.[3]

Les Britanniques ont compris le problème et ne veulent plus de la libre circulation des personnes
Dans l’autre colonne de cette statistique, nous avons les pays de destination de ces migrants. Parmi les pays européens d’une certaine taille, la Suisse s’inscrit largement en tête du classement selon l’admission de migrants. Depuis 1990, la population de notre pays s’est accrue de plus d’un quart à cause de l’immigration. Cette croissance démographique excessive nous conduit à grands pas vers une Suisse à 10 millions d’habitants. Quand Monsieur Hahn, commissaire UE, a l’outrecuidance de proposer « un tir d’avertissement contre la Suisse »[4] parce qu’elle refuse de signer l’accord institutionnel qui la contraint de reprendre automatiquement du droit européen et de se soumettre à la juridiction européenne, il faut lui rappeler que, par exemple, la population de l’Allemagne n’a progressé que de 4% depuis 1990. Durant les trente ans écoulés, la Suisse a donc dû absorber une croissance démographique six fois plus élevée que l’Allemagne. Les habitants de la Grande-Bretagne l’ont bien compris. Ils ont donc voté le 23 juin 2016 pour la sortie de l’UE, donc notamment pour la résiliation de l’accord de libre circulation des personnes avec l’UE.

Quelles sont les autres raisons de cette immigration de masse en Suisse? Le produit intérieur brut de la Suisse (PIB) par habitant est actuellement de 80’000 francs par habitant – soit, notons-le en passant, au même niveau qu’en 2008. Or, le PIB par habitant est de 36’000 euros en Grande-Bretagne, de 29’000 en Italie, de 17’000 en Grèce, de 10’000 en Roumanie et de 8000 en Bulgarie, soit dix fois moins qu’en Suisse.

La prévoyance vieillesse est un autre motif d’immigration. Dans l’analyse globale de tous les systèmes de prévoyance vieillesse, la Suisse occupe la première place au niveau mondial, donc possède la meilleure prévoyance vieillesse du monde.[5] L’Allemagne doit se contenter du 13e rang, l’Italie et l’Espagne se trouvent au 29e et au 31e rang, soit même derrière la Chine. Les systèmes de prévoyance vieillesse de la Roumanie, de la Bulgarie, de l’Albanie et du Kosovo n’ont même pas été évalués.

Il est évident, dans ces conditions, qu’un Roumain ou un Bulgare, dont les pays ne sont plus soumis depuis huit mois à la clause de sauvegarde, mettra tout en œuvre pour déménager dans le pays dont les salaires sont les plus élevés d’Europe et dont le système de prévoyance vieillesse est le meilleur du monde.

Un étranger sur 10 aptes au travail vit au frais des contribuables suisses
Mesdames et Messieurs, nous connaissons fort bien les conséquences d’une immigration nette de 50’000 à 60’000 personnes en Suisse. Ces gens concurrencent les travailleurs suisses en acceptant des bas salaires. Qui plus est, ils vivent plus souvent que les Suisses à charge des assurances sociales. Ainsi, la Confédération note que « si le taux de chômage chez les Suisses varie entre 3.0 (2012) et 4.0 (2014) %, la situation est moins favorable chez les étrangers: le taux de chômage a atteint 7,5% dans la population étrangère. » [6] Conclusion: près d’un étranger sur dix aptes à exercer une activité lucrative ne travaille pas, donc vit aux frais des contribuables suisses. La situation est semblable dans l’assurance-invalidité (AI): selon une étude de l’Office fédéral des assurances sociales (OFSP), ce sont surtout les personnes originaires d’Espagne, d’Italie, du Portugal et d’ex-Yougoslavie qui perçoivent nettement plus souvent une rente AI que les Suisses.[7] Même le Conseil fédéral est contraint de faire le constat suivant concernant l’AVS: « A long terme, les cotisations fondent bien entendu des droits aux rentes qui chargeront l’AVS dans 30 à 40 ans. » [8] Les prestations complémentaires de l’AVS, dont le coût a plus que doublé depuis l’an 2000 pour passer de 2 à 5 milliards de francs, ne sont perçues que par 11% des rentiers AVS suisses alors qu’un étranger sur quatre en bénéficie.[9] Le même constat vaut pour le programme de réduction des primes d’assurance-maladie dont les coûts ont littéralement explosé pour dépasser 4,5 milliards de francs et dont le nombre de bénéficiaires étrangers est disproportionné.

La prochaine vague de migration arrive – les migrants économiques doivent être systématiquement renvoyés
Jetons encore un regard au-delà des frontières de l’Europe. 3,6 milliards de personnes sont touchées au niveau mondial par une pénurie d’eau. Les conséquences de cette situation sont non seulement des sécheresses et des famines, mais aussi des conflits armés et des guerres civiles. Alors qu’en 1980 la moitié des quelque 300 millions d’habitants que comptait l’Afrique à cette époque vivaient dans la pauvreté, la proportion de pauvres n’a pas changé aujourd’hui, mais le nombre d’habitants a atteint 1 milliard. Compte tenu de la croissance démographique mondiale et de la raréfaction constante des ressources, il est évident que la Suisse sera confrontée dans les vingt à trente années à venir à des flux migratoires massifs en provenance d’Afrique et d’Asie. Il s’agit donc de s’y préparer dès à présent en réintroduisant des contrôles systématiques aux frontières et en renvoyant systématiquement les migrants économiques directement aux frontières.

Nous voulons une immigration modérée que les Suissesses et les Suisses peuvent contrôler eux-mêmes
Mais où est-il ce Conseil fédéral prévoyant, courageux et responsable qui agit enfin énergiquement et rigoureusement et qui dit clairement « cela suffit! » à l’UE? Où est-il ce Conseil fédéral qui explique une fois pour toutes clairement à Madame von der Leyen et à Monsieur Hahn que la Suisse n’accepte plus cette immigration de masse en provenance de l’UE? La Suisse est ouverte à la coopération scientifique avec des universités américaines, chinoises, britanniques, allemandes et françaises. La Suisse est ouverte au libre-échange avec les Etats-Unis d’Amérique, la Chine, la Grande-Bretagne (également après le Brexit) et l’UE. Compte tenu de la position géographique centrale de la Suisse en Europe, Berne et Bruxelles ont tout intérêt à conclure des accords dans les domaines des transports aériens et terrestres. En revanche, accorder la pleine libre circulation des personnes, donc un droit contractuel d’immigrer en Suisse aux plus de 500 millions d’habitants de l’UE relève d’un comportement imprévoyant, déraisonnable et même totalement irresponsable.

Nous voulons une immigration mesurée, une immigration que nous pouvons contrôler nous-mêmes, une immigration adaptée aux besoins de notre pays certes petit, mais leader international de plusieurs points de vue. Cette immigration ne doit pas apporter des inconvénients massifs à notre pays et entraîner la discrimination des Suissesses et des Suisses. Une immigration dictée par l’UE cause des dommages irréparables à nos structures politiques et sociales et finit par détruire la Suisse telle que nous la connaissons aujourd’hui. Pour toutes ces raisons, il faut voter clairement OUI le 17 mai prochain à l’initiative de limitation!


[1] NZZ, «Die Bevölkerung Europas hat sich von Osten nach Westen verschoben», 31 juillet 2018, https://www.nzz.ch/international/osteuropas-bevoelkerung-schrumpft-in-rekordzeit-ld.1392288

[2] SEM, https://www.sem.admin.ch/sem/de/home/publiservice/statistik/auslaenderstatistik/einbuergerungen.html

[3] Analyse de données de Tomáš Sobotka et de son équipe du Wittgenstein Centre for Demography and Global Human Capital à Vienne, http://www.populationeurope.org

[4] Lettre de Johannes Hahn à Jean-Claude Juncker du 17 juin 2019, https://files.newsnetz.ch/upload//2/3/238167.pdf

[5] 2018 Global Retirement Index, https://www.im.natixis.com/us/resources/2018-global-retirement-index-report

[6] BFS, https://www.bfs.admin.ch/bfs/de/home/statistiken/arbeit-erwerb/erhebungen/els-ilo.assetdetail.9286304.html

[7] Migrantes et migrants dans l’assurance-invalidité. Couches sociales, état de santé et risque d’invalidité, rapport de recherche no 2/10

[8] SECO, SEM, OFS, OFSP (2019), «15e rapport de l’observatoire de l’accord de libre circulation des personnes Suisse-UE. Effets de la libre circulation des personnes sur le marché du travail et les assurances sociales », page 31

[9] OFSP, « Statistique des prestations complémentaire AVS et AI 2016 – tableaux », page 7

Thomas Aeschi
Thomas Aeschi
conseiller national Baar (ZG)
 
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