L’invité: Martin Janssen, commentateur invité, chef de PME et professeur d’économie des marchés financiers à l’Université de Zurich
Une personne qui prend sa retraite aujourd´hui bénéficie d´une espérance de vie moyenne de 23 ans. Ce chiffre augmente chaque année de plusieurs mois, si bien qu´il atteindra 24 ans dans cinq ans. Comment cette espérance de vie croissante peut-elle être financée dans le cadre de l´AVS et quel rôle l´immigration joue-t-elle à ce propos?
L´AVS est un grand pot d´argent qui récolte durant le mois en cours les cotisations et les contributions de l´Etat pour, le mois suivant, payer les rentes des retraités. Si l´espérance de vie augmente, les sorties dépassent les entrées. Comment réagir? On pourrait augmenter l´âge de la retraite, exiger des cotisations plus élevées, accélérer la croissance économique, augmenter le nombre d´actifs, réduire les rentes ou augmenter les contributions de l´Etat moyennant les impôts. Durant les années écoulées, l´immigration de quelque 70 000 étrangers par an a apporté une contribution importante à l´équilibre financier du pot AVS sans qu´il soit nécessaire d´augmenter les cotisations, de réduire les rentes ou de prendre d´autres mesures.
Ce constat suscite cependant trois remarques. Premièrement, on sait que l´immigration provoque des coûts dans d´autres domaines comme le marché du logement, les routes, les chemins de fer, etc. Il faut donc se demander s´il vaut la peine d´accepter ces charges supplémentaires du seul fait que l´immigration maintient momentanément en équilibre les finances de l´AVS. Deuxièmement, il ne faut pas oublier que le problème de fond de l´AVS provient de l´augmentation de l´espérance de vie et des changements des structures démographiques. Et ce problème, on ne le résoudra pas par l´immigration, d´autant moins que celle-ci peut aussi avoir un effet inverse. Troisièmement, et c´est ce qui me paraît le plus important, la «solution» de l´immigration empêche de voir l´essentiel: le contrat à long terme entre générations que représente l´AVS ne peut être respecté que s´il est adapté aux caractéristiques de la Suisse et de son économie. De ce point de vue, la véritable croissance économique, qui devrait être renforcée par une débureaucratisation et une dérégulation massives, joue un rôle fondamental. Malheureusement, l´immigration arrange de nombreux élus politiques parce qu´elle leur permet de reporter la solution du problème de l´AVS. Là encore, un récent adage s´applique: «La Grèce est partout!»
Martin Janssen, commentateur invité, chef de PME et professeur d´économie des marchés financiers à l´Université de Zurich